Un nouvel amour
"Isabelle Huppert, un jour, elle a dit : "Un bon metteur en scène, c'est un metteur en scène qui est amoureux de son actrice, mais qui passe pas à l'acte."
Allez, hop, du blog ! Du blog, ça veut dire (en général) que je suis trop crevé pour faire autre chose - même pour lire. C'est comme une addiction, certains ont le tabac, moi, c'est le blog. Ça fait pas du bien, ça repousse les problèmes - et puis il faut penser à ce qu'on dit et ce qu'on ne dit pas en cette époque à problème, à censure, à délicatesse, à puritanisme. Le plus étrange, pour moi, j'en ai parlé sur Facebook, c'est l'expression "ménager les sensibilités religieuses". C'est vrai qu'ils sont tellement sensibles, les religieux... Moi, ça fait quand même vingt-cinq ans qu'un jour sur trois, disons, je me fais insulter en rentrant chez moi - j'ai même pris un coup d'boule, l'autre jour - par des jeunes "du quartier", n'est-ce pas, probablement imbibés jusqu'à plus soif d'une religion qui les rend, mon Dieu, si sensibles... Bon, mais je ne m'étais pas posté devant l'écran pour écrire des choses comme ça. Isabelle Moulin me conseille de danser sous une burqa à la soirée "Montre-moi ta Pina", Audrey Gaisan ajoute une variante : en burqini (le maillot de bain burqa) avec quelqu'un pour m'asperger au kärcher... Hum ! Me prend-on pour un guignol ? Moi qui ne rêve que d'arriver sur scène pour lire, je n'sais pas, la Bible (avec ma belle voix) - obligé de FAIRE DE LA PERFORMANCE ! Je suis en train de tourner autour du pot. (Je ne vous dis pas l'essentiel.) Aujourd'hui : Robin Causse, immense artiste. Bon, mais, dit comme ça, ça fait bête. Disons : une rencontre. On s'est vu hier soir et cette après-midi. Très grande puissance, plasticité, liberté, très grand plaisir de jouer, d'être, d'explorer et de se tenir, comme j'aime, dans ces endroits - avec le public - où tout est possible, toujours. L'ouvert, l'ouvert et l'ouvert, toujours, à l'infini : le théâtre, pour l'écoulement, la poésie, pour la précision, la musique, pour la grâce et la danse, pour le rythme, la peinture, pour la beauté, et le cinéma, le cinéma, évidemment, pour le théâtre, l'écoulement, etc. Capable de tout jouer, travestissement dans les deux sens, virilité et féminité. Il amène Dali, Almodovar, Hitchcock, Mastroianni, tout Hollywood et les séries, Pasolini, Bunuel, Shakespeare, Calderon, Gus Van Sant, Fellini, baroque extrême et netteté à la Bob Wilson, il dit une lettre d'amour sublime écrite par lui quand il avait douze ans, il sort un morceau de bravoure d'un texte de Rodrigo Garcia, il écrit le portrait d'une femme, légère, chemise à l'épaule, comme un écrivain, il traverse des églises, des plages, des rues, des intérieurs, des bordels, des champs de maïs, des journaux, des films, beaucoup de films, une cinémathèque, une bibliothèque, une discothèque et toute la gamme des sentiments actionnée par tous les petits muscles minuscules du visage, les modulations de la voix, le corps disponible dans sa virtuosité d'étonnement, de chance, ni âgé ni jeune ni mûr ni naïf, aucune question - je vous en pose, moi, des questions ? "Vous et moi, semble-t-il dire à chaque instant, nous savons ce que nous sommes venu faire en ce théâtre, nous le savons et nous le partageons : ce plaisir. Cela vous plaît, cela me plaît, je vous plais, vous me plaisez." Il est comme un soliste sans ego face à un orchestre sans tension dont il fait pourtant résonner toutes les cordes, les peaux tendues, les cuivres. Comme un excellent acteur de Warlikowski qui viendrait faire du Genod (puisqu'ici, c'est le jeu), il descend dans l'arène, il s'abaisse, c'est à dire juste le démantèlement du sens, juste son ouverture, juste là où ne pas savoir est le plus intéressant... J'espère qu'il notera ce qu'il a fait, je suis incapable de noter ce que j'ai vu. J'ai retrouvé les sensations que j'avais eues au moment du Dispariteur, (quand Eric Martin avait rejoint Jonathan Capdevielle) : arriver au bon moment au bon endroit, aucune rétention apparente, au contraire : le décollement. (Eric disait que de jouer dans le noir l'avait désinhibé et Jonathan, d'y sentir sa présence, était comme tombé amoureux.)
Allez, hop, du blog ! Du blog, ça veut dire (en général) que je suis trop crevé pour faire autre chose - même pour lire. C'est comme une addiction, certains ont le tabac, moi, c'est le blog. Ça fait pas du bien, ça repousse les problèmes - et puis il faut penser à ce qu'on dit et ce qu'on ne dit pas en cette époque à problème, à censure, à délicatesse, à puritanisme. Le plus étrange, pour moi, j'en ai parlé sur Facebook, c'est l'expression "ménager les sensibilités religieuses". C'est vrai qu'ils sont tellement sensibles, les religieux... Moi, ça fait quand même vingt-cinq ans qu'un jour sur trois, disons, je me fais insulter en rentrant chez moi - j'ai même pris un coup d'boule, l'autre jour - par des jeunes "du quartier", n'est-ce pas, probablement imbibés jusqu'à plus soif d'une religion qui les rend, mon Dieu, si sensibles... Bon, mais je ne m'étais pas posté devant l'écran pour écrire des choses comme ça. Isabelle Moulin me conseille de danser sous une burqa à la soirée "Montre-moi ta Pina", Audrey Gaisan ajoute une variante : en burqini (le maillot de bain burqa) avec quelqu'un pour m'asperger au kärcher... Hum ! Me prend-on pour un guignol ? Moi qui ne rêve que d'arriver sur scène pour lire, je n'sais pas, la Bible (avec ma belle voix) - obligé de FAIRE DE LA PERFORMANCE ! Je suis en train de tourner autour du pot. (Je ne vous dis pas l'essentiel.) Aujourd'hui : Robin Causse, immense artiste. Bon, mais, dit comme ça, ça fait bête. Disons : une rencontre. On s'est vu hier soir et cette après-midi. Très grande puissance, plasticité, liberté, très grand plaisir de jouer, d'être, d'explorer et de se tenir, comme j'aime, dans ces endroits - avec le public - où tout est possible, toujours. L'ouvert, l'ouvert et l'ouvert, toujours, à l'infini : le théâtre, pour l'écoulement, la poésie, pour la précision, la musique, pour la grâce et la danse, pour le rythme, la peinture, pour la beauté, et le cinéma, le cinéma, évidemment, pour le théâtre, l'écoulement, etc. Capable de tout jouer, travestissement dans les deux sens, virilité et féminité. Il amène Dali, Almodovar, Hitchcock, Mastroianni, tout Hollywood et les séries, Pasolini, Bunuel, Shakespeare, Calderon, Gus Van Sant, Fellini, baroque extrême et netteté à la Bob Wilson, il dit une lettre d'amour sublime écrite par lui quand il avait douze ans, il sort un morceau de bravoure d'un texte de Rodrigo Garcia, il écrit le portrait d'une femme, légère, chemise à l'épaule, comme un écrivain, il traverse des églises, des plages, des rues, des intérieurs, des bordels, des champs de maïs, des journaux, des films, beaucoup de films, une cinémathèque, une bibliothèque, une discothèque et toute la gamme des sentiments actionnée par tous les petits muscles minuscules du visage, les modulations de la voix, le corps disponible dans sa virtuosité d'étonnement, de chance, ni âgé ni jeune ni mûr ni naïf, aucune question - je vous en pose, moi, des questions ? "Vous et moi, semble-t-il dire à chaque instant, nous savons ce que nous sommes venu faire en ce théâtre, nous le savons et nous le partageons : ce plaisir. Cela vous plaît, cela me plaît, je vous plais, vous me plaisez." Il est comme un soliste sans ego face à un orchestre sans tension dont il fait pourtant résonner toutes les cordes, les peaux tendues, les cuivres. Comme un excellent acteur de Warlikowski qui viendrait faire du Genod (puisqu'ici, c'est le jeu), il descend dans l'arène, il s'abaisse, c'est à dire juste le démantèlement du sens, juste son ouverture, juste là où ne pas savoir est le plus intéressant... J'espère qu'il notera ce qu'il a fait, je suis incapable de noter ce que j'ai vu. J'ai retrouvé les sensations que j'avais eues au moment du Dispariteur, (quand Eric Martin avait rejoint Jonathan Capdevielle) : arriver au bon moment au bon endroit, aucune rétention apparente, au contraire : le décollement. (Eric disait que de jouer dans le noir l'avait désinhibé et Jonathan, d'y sentir sa présence, était comme tombé amoureux.)
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