L’Etat second
Cléo me demande :
« Et, toi, tu as une origine ? » C’est une phrase absolue qu’elle
prononce au sortir du bain, vers 7h et demie, le soir, sur la plage orientée
vers l’ouest. Et j’y repense car je relis ce matin une citation de Ludwig
Wittgenstein : « Il est tout à fait remarquable que nous soyons
enclins à penser que la civilisation – les maisons, les rues, les voitures,
etc. – éloigne l’homme de son origine, de ce qui est élevé, infini, etc. Il
semble alors que notre environnement civilisé, y compris les arbres et les
plantes, soit enveloppé dans une cellophane bon marché et coupé de tout ce qui
est grand, coupé pour ainsi dire de Dieu. C’est un étonnant tableau qui
s’impose alors à nous. » Hier, j’étais si fatigué, plus la soirée
s’enfonçait dans la nuit, plus les participants semblaient briller, mais, moi,
je rentrais dans un état second (avec comme seule perspective réelle mon
matelas sous la tente). Je me sentais proche des enfants, Lou et Cléo, qui ont
si souvent attendu pendant des heures que les adultes épuisent leur capacité
d’accentuer les heures… Souvent, maintenant, la scène se passe au cinéma,
devant un film. Stéphane a essayé de leur passer un film russe, mais Cléo s’est
plainte de ne pas arriver à lire assez vite les sous-titres. Va donc pour OSS
117 qu’elles ont déjà regardé quinze
fois. J’étais déjà allé chercher un pull, j’en avais profité pour rester un peu
devant Rüdigler Vogler et Jean Dujardin. Puis, quand j’étais revenu, on parlait
de moi. Plus tard, profitant de l’arrivée tardive d’Olivier et Pépita, je
m’étais déporté de la table du dîner et, là, sur un fauteuil de plastique
blanc, devant les citrouilles, Cléo était venue me faire ce que je ne pouvais
pas voir autrement que comme une représentation de théâtre. Je ne me souviens
absolument pas de ce qu’elle disait, mais je me souviens que j’étais frappé par
la qualité de son jeu.
Labels: voyage corse
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