Friday, August 24, 2012

The Store



Doit-on parler des amours mortes ? Il y a toujours un endroit qui est ma vie privée, un endroit que j’aime, c’est une fourche, un peu derrière la gare de l’Est. Chaque fois que j’y passe, c’est souvent, c’est comme ma Madeleine de Proust, je me souviens de l’amour de Pierre, comme si l’amour n’était plus qu’à cet endroit, nulle part ailleurs – ou alors par le biais du souvenir conscient, mais, là, il y a autre chose. C’était là que nous nous séparions, Pierre partait vers Jaurès et, moi, je remontais vers La Chapelle. Il se passait là une chose juste. Pierre m’aimait. Nous avions notre vie secrète, là, nous nous séparions, banalement, personne n’aurait pu remarquer et – nous nous aimions plus que tout – une certitude – un secret peut-être équivalent aux ententes durant la résistance… Nul à l’extérieur, pur jardin secret. De cet endroit, à cet endroit, je sais que Pierre m’a aimé. Ce n’est pas forcément mon cas. Je suis trop narcissique. Mais Pierre, ce n’est pas pareil. Pierre a besoin d’aimer, c’est dans sa structure. Pour lui, ce naturel, cette certitude, « j’aime Yves-Noël », je le ressentais quand nous nous séparions sans un mot à l’endroit de la fourche – ai-je dit que nous étions en Vélib’ ? même pas – bon, voilà, nous nous séparions en vélo, l’un continuait et, moi, j'allais à gauche, je remontais.



« La lune se balance dans son miel comme un mobile de Calder, mais Marc est triste. »



« I want to be buried naked, I know there's a store where I'm going. »



Il y aura toujours une vie privée, même délavée… Ma vie privée est ce que je ne raconte pas… Je traque la moindre nouveauté que je pourrais raconter, mais, bien des choses, je ne les raconte pas car je les ai déjà racontées, des choses similaires sinon les mêmes. Photocopies de photocopies, telle est la vie privée…



« C’est donc à la fois amplifié et sacré, rapide et lent. »

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