Le Tarn qui brille, mon Dieu
C’est un immeuble à la
campagne. On ne voit pas tout de suite la beauté. Parce qu’on regarde le plein.
Bêtement. La beauté ne se voit que quand on s’aperçoit du « creux »
que cela dessine. Ce creux est infini. C’est aussi ça. Ça s’appelle le « temps ».
Pour le temps, évidemment, il
y a des mirages. Je veux dire : des signes, des symboles. Il y a le pont,
là-bas, et il y a le Tarn. Le pont du chemin de fer. Il y a le Tarn. Les
ouvriers qui repeignent la chambre au-dessous font aussi partie du temps. On
les entend / on ne les entend pas. On ne les voit jamais. Leur voiture est dans
la cour. (Là où je suis, je suis tourné vers le fleuve.) – Est-ce que la
lumière fait partie du temps ? – Non, c’est autre chose, la lumière. Il y a
la lumière et il y a le temps. – Les ciels, est-ce qu’on peut s’y noyer, s’y
baigner ? – C’est à voir. On ne sait pas. Peut-être quelques héros l’ont
tenté… Peut-être Bébé… Benoît s’y est brûlé les ailes. Benoît, c’est la version
pure de l’anti-Bébé. Benoît, c’est Andy Warhol et, Bébé, c’est Joe Dallessandro.
Sur son balcon de Miami. Avec le ciel. Trop de méditation en plein ciel, Benoît... C’est ce que je lui dis. Je n’arrête pas… Bébé, non. Bébé galope dans
les alpages, mais ne se brûle pas au ciel.
Nous irons nous baigner dans
le Tarn.
Qui passe, là.
Sous nos fenêtres.
Et puisque nous sommes seuls.
Nous nous noierons. Sous nos fenêtres. Seuls sans Bébé.
Oh, je regretterai cet
endroit ! Pas de moustiques. A cause des chauves-souris qui habitent les
chambres…
J’ai oublié de parler de
l’araignée, hier, ça m’est revenu dans la nuit. Je voulais parler des animaux à
cause de l’araignée (géante) que j’ai trouvée dans les « chiottes »,
comme dit Babeth. « Là aussi, c’est des chiottes. C’est l’usage d’appeler
ça « Toilettes », mais, enfin, bon… » Je ne l’ai pas tuée. Vous
me prenez pour qui ? Je suis allé me coucher parmi les araignées, les
chauves-souris, les soucis, les murs suintant d’angoisse, les
murs épais, le temps – retrouvé. Il faut qu’il y en ait un qui, comme moi,
reste éveillé... Passion froide. Tous les mots que vous employez, je les emploie
aussi. Je ne suis pas de ce monde. Ni de ce monde-là.
C’est l’été / ce n’est pas
l’été. C’est une saison infidèle. Ce n’est pas les tropiques, ce
n’est pas l’hiver. Ce n’est pas le froid (nous sommes nus), ce n’est pas la
chaleur (nous avons froid aux pieds).
Nous sommes allés dans le
jardin. Tout à l’heure. Ramasser des cerises. Quelques coquelicots aussi. Le
sang, c’est la couleur qui est à la mode, je le lis dans « Le Figaro
magazine ». La couleur, dit Paul Claudel, de ce qui sort. « La
couleur de ce qui était dedans et qui sort », précisément. Je me demande
si je vais aller voir Marlène et Jonathan (et Robin…), demain, à Toulouse. Je
suis tout près. Mais j’ai peur – d’ici demain – de m’éloigner encore… Une
demi-heure de train, ça fait combien en vélo ? Je pourrais envoyer un mot…
A ce propos, ai-je dit que Babeth ressemble beaucoup à Jonathan ? Non, je ne l’ai certainement pas dit – quel intérêt ?
Mais ça m’amuse beaucoup… « Rouge Baiser indélébile qui, depuis 1927,
permet d’embrasser sans bavure »…
Une phrase comme :
« Les arbres se déployaient sur le ciel », rend compte de la
situation. Il n’y en a point d’autres. Reste à convaincre qu’il s’agit de
littérature. De toute la
littérature. C’est une affaire de marketing. (Ce n’est pas mon affaire.)
Je suis nu dans ce grand et
vaste château des bords de l’eau. Comme Bébé a tort de ne pas être venu !
Si tu veux, Bébé, je vais te chercher à Toulouse… (Message personnel à faire
passer, mon gentil Sébastien, mon gentil facteur.)
Irai-je me noyer dans le ciel
– irai-je me noyer dans la mer – le mer du ciel, la mer du temps ? La
rivière est comme une erreur. Elle coule le long de l’onde et ruisselle comme
une ondée. La rivière est la gouttière du temps. Comme une ondée. Il y a des
bruits d’oiseaux qui s’y recueillent… Et, moi, sur mon balcon de l’absence de
Dieu… Oh, s’il y a bien une certitude, c’est celle-ci ! L’absence de Dieu... Après, le sens des mots… Voir Spinoza et tutti quanti ! Babeth me plaît,
son débit à l’ancienne. Je m’aperçois que je l’imite. Cette vieille jeune
fille. En tout cas, je subis son influence… Comment faire autrement ? Dans
cette immense demeure qui n’a pas de fin. Pas de fin, pas de fin et qui n’est
pas « infinie ». Infinie, ce ne serait pas une maison. Mais c’est une
maison. Une maison sans fin. Le parc a cent hectares. Monsieur Le Maire, que
représentent cent hectares ? Vous ne le savez pas ? C’est normal, ça
ne représente rien.
La maison est contenue dans
ton rêve. Il y a le fleuve qui la traverse. Le navire-fleuve. Qui a emporté la
terrasse, en 70. Ça a été terrible. Trois arches. Mon
père a consolidé en béton. – Le château a failli partir ? – Oui. Je n’étais
pas là. Je devais être à Lorient, à ce moment-là... Ça a été terrible…
Labels: château
0 Comments:
Post a Comment
<< Home