Friday, March 01, 2013

Notes sur la mélodie



J'ai toujours dans la poche ce livre que j'aime tant de Rilke. Notes sur la mélodie des choses...

VII 
Et il y a bien aussi des instants où un homme devant toi se détache calme et clair sur fond de sa splendeur. Ce sont des fêtes rares, que tu n'oublies jamais. Cet homme, désormais, tu l'aimes. C'est à dire tu t'appliques, de tes mains tendres, à copier les contours de sa personnalité telle que tu l'as perçue à cette heure. 

VIII 
L'art fait de même. Il est, oui, l'amour en plus ample, en plus démesuré. Il est l'amour de Dieu. Il n'a pas le droit de s'arrêter à l'individu, qui n'est que la porte de la vie. Il doit la franchir. La fatigue lui est interdite. Pour s'accomplir il doit oeuvrer là où tous - sont un. Et quand il fait don de cet un, alors survient à tous une richesse sans limites. 

IX
Combien l'art en est loin, cela peut se voir sur la scène, où pourtant il dit ou veut dire comment il considère la vie, non pas l'individu en son idéal repos mais le mouvement et le commerce de plusieurs. Or il s'avère qu'il place simplement les hommes côte à côte, comme on faisait au Trecento, et leur laisse à eux-mêmes  le soin de lier amitié par dessus le gris ou l'or de l'arrière-fond. 

X
Du coup aussi voici ce qui se passe. Ils essaient de s'atteindre avec des mots, des gestes. C'est tout juste s'ils ne se démettent pas les bras, car les gestes sont bien trop courts. Ils font d'infinis efforts pour se lancer les syllabes et, en même temps, ce sont encore de franchement mauvais joueurs de ballon, qui ne savent pas rattraper. Si bien qu'ils passent leur temps à se pencher et à chercher - tout comme dans la vie. 
...  

Je t'embrasse. 
L.

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