Fou de Charli
Je dis à Erik que, quand nous sommes avec ses 2 enfants, cela me rappelle un livre d’Hervé Guibert que j’ai lu il y a si longtemps, je ne me rappelle plus très bien (j’étais moi-même enfant) : Voyage avec 2 enfants. 2 adultes et 2 enfants, l’un des enfants plus beau que l’autre, l’un préféré, l’autre « disgracieux », dit Hervé Guibert. Je n’ai plus ce livre, je n’ai pas la place de garder les livres ; j’aurais dû construire une bibliothèque depuis toujours et les garder depuis toujours ; j’habiterais alors une grotte de livres, ce serait beau. Au lieu de ça, la page blanche. Oui, bon — bof. Je lis sur la page des Editions de Minuit : « Le Voyage est un récit déconcertant, aussi sinueux et tortueux que la libido de l’auteur. Il y a des jours vrais, et des jours faux. » Il y a qq phrases de l’auteur aussi : « J'hésite à écrire : voyage de merde, enfants de merde. Le début du mensonge : L’écrire serait renoncer au roman ». Et puis ça qui est assez vrai : « J’ai parfois l’impression que mon moyen de séduction à l’égard des enfants est la vérité, la sincérité, alors que le moyen de séduction à notre égard est le mensonge, l’insincérité. » « L’enfant chaste », « l’enfant joli »... Charli, je pensais, ressemble à Théo. En fait, pas tant que ça, mais Théo ressemble encore à l’adolescent, à l’enfant qu’il a été. J’ai aimé l’amitié que me manifestait Charli, l’intérêt, que je pouvais être une pierre dans son intérêt de vivre. De survivre, j’ai envie de dire. Comme l’adolescence est d’un poids immense ! J’ai reconnu ce temps, ces épreuves, et ce temps qui va si vite. La prise de conscience de tout un avenir qui se dessine — tout d’un coup, il y a urgence —, mais les données sont fausses et les données qui nous échappent sont fausses autant que vraies. « Tu verras, ça se traverse, il y a une métamorphose », je lui ai dit, lorsqu’il était prostré. « Ne perds pas courage. » Et son intérêt, soudain, cet espoir, quand la soirée sort de ses rails inintéressants, ces rails d’inintérêt, quand je l’ai pris avec moi pour aller au 22, bd Boyer. La douche, etc, les cheveux. Et son intérêt pour cette réunion d’adulte, mais dans la maison d’ « un ex ex ex de ma mère ». Un nommé Vincent. Qui n’y habite plus. Plus tard, il me demandera mon iPhone non pas pour « faire des jeux », comme quand il craque, mais pour photographier pour montrer à sa mère. Il habite dans la Drôme, mais il va au collège en Ardèche (en internat). Il faut traverser le Rhône. Plus tard, il vient encore — je suis déjà au lit — me remercier pour la soirée. Ce garçon a de l’avenir. Chéri ! Erik m’a dit qu’il n’était pas de lui, que son amie l’avait conçu avec un autre à un moment où ils étaient séparés, mais que c’est lui qui l’avait élevé. J’ai oublié de demander si le petit savait ça. Je me demandais si on pense à le dire à l’intéressé, au fil des jours, et alors quand ? ce qu’on pense à dire à n’importe qui d’autre facilement. Alors, comme j’avais oublié de le demander à Erik, j’ai imaginé que le petit venait au 22, bd Boyer avec cette histoire d’« ex ex ex » de sa mère — je me souviens m’être demandé ce qu’il avait voulu me dire avec cette suite d’ex, alors qu’un ex est un ex, point — pour retrouver les traces d’une histoire qui avait quand même un peu compté dans sa vie. Mais tout ça est imaginaire... Vincent est le prénom d’un des 2 enfants du Voyage, celui qui inspirera encore un autre livre célèbre d’Hervé Guibert : Fou de Vincent.
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