Saturday, June 22, 2013

« L’amas de ses rubans a-t-il su vous charmer ? »



Il y a comme un amour dans ma solitude ce soir. Cette nuit. De l’autre côté de la rue, il y a une fête. Je laisse la fenêtre ouverte. J’aime la vie. Même si elle est de l’autre côté de la rue, je laisse la fenêtre ouverte. Je suis allé voir les amis jouer Le Misanthrope, à l’Odéon. J’ai découvert la pièce. On oublie tant que ça ? En fait, pas complètement encore. Je n’ai pas tout découvert. J’en ai découvert une bonne partie, mais beaucoup m’a échappé aussi. Au point que je me suis demandé si c’était une bonne pièce. Et, Molière, un bon auteur. C’est parfois (souvent) si génial et parfois des tunnels. Ce qui m’a étonné, c’est à quel point le personnage d’Alceste n’évolue pas. Excellemment joué par Nicolas, je dois dire. Je n’aime pas toujours ce que fait Nicolas, mais, là, il m’a épaté. Il rencontre vraiment qq’un, qqch. Justesse, réel terrifiants. Mais il n’évolue pas. On voit tout de suite que c’est un fou et que rien ne pourra le sortir de sa folie (Nicolas montre excellemment cette folie). Alors, passée la joie des scènes d’expositions, quand semble se nouer une intrigue  — certes faible — on s’ennuie un peu parce qu’on voit d’avance où ça va : nulle part. Alceste restera dans sa folie. On s’intéresse alors à l’histoire de Célimène, celle qui dit des choses gentilles à tout le monde. Excellente Norah. C’est une pièce très, très étrange, très complexe. « S’aimer sur la scène et se haïr en coulisse », dit Jean-François Sivadier. C’est vrai. Très étrange comme ces gens sont occupés de choses si volatiles. Et eux-mêmes sont emportés depuis si longtemps… Et pourtant — tout aussi étrange —, ils sont là encore à nous parler — et à nous parler français ! Ces êtres dont la vie est si rapide, si oubliée, si disparue — la vie à la cour ! — sont là, avec la simplicité du gros théâtre pur — mais est-ce une bonne pièce ? —, abyssal… Séparer — ou ne pas séparer — les acteurs des personnages… «  Une parole qui, jusqu’à l’asphyxie ne sort jamais de son sujet », écrit Jean-François Sivadier : déguiser la nature humaine. J’ai écrit des belles choses sur ce très beau spectacle. Mais il faudrait que je relise mes notes. Pas le courage, ce soir. «  A supposer que vous viviez dans le grand espoir (« que l’homme soit un ami pour l’homme ») et que vous ayez des amis qui ne peuvent s’associer à cet espoir : est-ce votre amitié ou votre grand espoir qui s’en trouve diminué ? » Après, sous les arcades, Nicolas me parle de l’adresse au roi, de Molière, qu’on sent très fort dans le spectacle, c’est vrai. Le dialogue au roi.

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