Wednesday, June 08, 2016

U ne école de la liberté


On va se régaler avec ce cours. Il est très libre. Il va être très libre. Une école de liberté. Les lundi et les mardi, à partir de septembre, je serai disponible à une sorte d’entraînement régulier à… la liberté. Hier, au deuxième cours de préfiguration, il n’y avait que deux femmes cinéastes (documentaires) qui m’ont demandé si elles pouvaient « observer », un photographe que je connais qui m’avait demandé s’il pouvait faire des photos et un garçon qui s’est présenté comme un assistant à la mise en scène. Il n’y avait pas d’interprètes (ceux de la veille avaient déserté), que des observateurs. Rien à filmer, rien à photographier. Mais, en parlant, quand même, autour de la table, j’ai vu qu’il se créait assez facilement un espace. Le plein mois de juin par les vitres et les portes ouvertes. Kataline (Patkaï), la tenancière, avait apporté son La Vie tranquille (de Marguerite Duras) qui, lui aussi, se tenait disponible, vivant, fermé, posé sur la table. Beaucoup de réel dans ce café, surtout avec l’été, comme ça, autour. Grandes baies. Bande-son. Scènes. Je ne sais pas comment, j’ai compris que ces quelques personnes timides étaient la disponibilité-même. Elles ont alors fait de très belles choses. On a pris La Vie tranquille et on l’a lu. Mais c’était pas pour lire, ça, on s’en fiche. Le livre, gentiment, nous aidait. C’était pour vivre. Aujourd’hui, je suis dans un parc, je continue de regarder l’amour, la vie. Une statue, un buste de Frédérick Lemaître, comédien, 1800-1875, qui n’a pas l’air commode. Non, nous, c’était autre chose. Je lis Stig Dagerman : Notre besoin de consolation est impossible à rassasier. Dans ce parc. Il y a la fontaine de l’écluse, etc. Il y a un homme qui est arrivé là complètement bourré. Il m’a fait penser à Thomas Scimeca qui en aurait fait un peu trop : il a jeté sa veste au sol et il s’est agenouillé, au début comme pour prier, mais il s’est allongé au soleil et, torse nu, engrange la vitamine D qui me manque, à moi comme à vous, lui, libre comme Gérard. « Puisque je suis au bord de la mer, je peux apprendre de la mer. Personne n’a le droit d’exiger de la mer qu’elle porte tous les bateaux, ou du vent qu’il gonfle perpétuellement toutes les voiles. De même, personne n’a le droit d’exiger de moi que ma vie consiste à être prisonnier de certaines fonctions. » Hier, le livre, La Vie tranquille, était libre et les lecteurs étaient vivants. Oui, cet autre livre que j’ai sous les yeux, de Stig Dagerman, parle aujourd’hui de ce dont nous entreprendrons dans cet entrainement régulier intitulé JOUER COMME GERARD qui aura lieu au café Pas si loin, 1, rue Berthier, à Pantin, les lundi et mardi  à partir du 19 et 20 septembre et jusqu’au 19 et 20 décembre. L’horaire suivra la déclivité de la lumière (on utilise la lumière du jour). Alors, d’abord, en septembre de 18 à 21h et on arrivera sûrement en décembre à quelque chose comme de 13 à 16h (nous descendrons dans la lumière de manière à avoir cette lumière du jour de fin de journée toujours).

« Je soulève donc de mes épaules le fardeau du temps et, par la même occasion, celui des performances que l’on exige de moi. Ma vie n’est pas quelque chose que l’on doive mesurer. Ni le saut du cabri ni le lever de soleil ne sont des performances. Une vie  humaine n’est pas non plus une performance, mais quelque chose qui grandit et cherche à atteindre la perfection. Et ce qui est parfait n’accomplit pas de performance : ce qui est parfait œuvre en état de repos. Il est absurde de prétendre que la mer soit faite pour porter des armadas et des dauphins. Certes, elle le fait — mais en conservant sa liberté. Il est également absurde de prétendre que l’homme soit fait pour autre chose que pour vivre. Certes, il approvisionne des machines et il écrit des livres, mais il pourrait tout aussi bien faire autre chose. L’important est qu’il fasse ce qu’il fait en toute liberté et en pleine conscience de ce que, comme tout autre détail de la création, il est une fin en soi. Il repose en lui-même comme une pierre sur le sable. » Tout le monde — comme ici Stig Dagerman — parle la même langue.

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