T raverser
« Oui, bien sûr, il y a cet espoir là, cette utopie là de proposer un monde commun à habiter, à inventer ses propres chambres. Ce n’est sans doute pas pour rien que la thématique des maisons, du voisinage, de la frontière, du frôlement est si présente dans ce que j’écris. Dans Un peuple, j’ai écrit quelque chose comme : la littérature est toujours de l’autre côté de la frontière. C’est une façon de dire que la littérature implique le geste de traverser. De même si, dans mes premiers livres, beaucoup de « mes personnages » étaient des professeurs, et plutôt des professeures d’ailleurs, c’était que je pensais que le savoir était un espace du partage ou du don, quelque chose autour duquel se réunir, un feu de camp, une zone de tiédeur. L’utopie de l’accueil hante sans doute mes livres mais comme toute utopie : est-ce même simplement possible ? Je ne sais pas. L’avantage d’une utopie, cela dit, est qu’elle peut orienter l’action, qu’elle offre une direction à rejoindre, qu’elle est une énergie. »
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