Wednesday, November 22, 2017

T oute croyance en des séparations est sans futur


C’était ça, pour Proust, cheveux plus courts et barbe teinte (photo Abel Llaval-Ubach). Moi, je pense que le problème vient de l’homocentrisme (même élargi au zoocentrisme, les droits des animaux, etc). L'immense majorité des textes de philo parlent de l’homme et de son environnement, ce qui est faux (l’environnement n’ayant bien sûr qu'une valeur de toile de fond). S’imaginer qu’il y a l’homme et tout le reste, c’est faux. Enfin, c’est une croyance qui ne sert plus beaucoup, sans avenir. Je le sais depuis un moment. Depuis, par exemple, un spectacle de Claude Régy dans lequel je jouais, de Wallace Stevens qui disait : « Pour la plupart des hommes, la vie est une affaire de personnes, pour moi, c’est une affaire de lieux » (je cite de mémoire). Tout ça a été énormément réactivé pour moi par le nouveau livre d’Emanuele Coccia qui s’appelle La Vie des plantes. Que je te recommande. Il montre (entre autres) que nous créons par notre respiration, notre souffle, une pollution qui nourrit les plantes et que la pollution que rejettent les plantes, l’oxygène, nous nourrit nous, qu’en fait donc nous créons avec les plantes (dont nous sommes les parasites) notre environnement, nous l’absorbons (il vient en nous) et nous le créons en permanence en complicité avec ces plantes qui ont commencé le boulot il y a bien longtemps (c’est elles qui ont créé l’atmosphère, le monde — sinon la terre n’est qu’un bout de caillou comme il y a en a tant — et que ce « monde » nous le créons tous les jours autant qu’il nous créé — nous et les autres animaux nous sommes inventés à partir de la catastrophe écologique des plantes qui est le rejet massif d’oxygène qui est la création de cette atmosphère. Nous nous mélangeons tous, les plantes, les animaux — dont nous sommes l’espèce dominante — dans le jardin planétaire de cette pollution originaire. Toute croyance en des séparations est sans futur (les Etats-Nation ! les hommes/les femmes…) Croire que l’homme est un cas à part et qu’il n’est pas son environnement — qu’il est dedans, mais qu’il ne l’est pas — et qu’il mérite pour cela une croyance, un amour spécial (cette croyance qui est celle dans laquelle nous sommes depuis trois cents ans : l’humanisme), ça a probablement atteint ses limites… qui conduit à la désespérance — que montre le film de Vincent. On va cesser de s’occuper de l’homme, de toute façon, c’est fini, mais, ça, c’est encore probablement d’autres terrifiants problèmes à venir… L’homme qui était un million d’années un chimpanzé amélioré risque de devenir une fourmi surdimensionnée… Bon, tu vois, j’en aurais des choses… Je ferais mieux de lire au lit, plutôt que de répéter mal ce que je n’ai qu’à demi compris. Mais c’est pour le plaisir de te parler.
Je t’embrasse, je pars à Lausanne, on se parlera à mon retour (tu m’as peu parlé de toi), 
Yvno

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