Merci pour ces deux jours, ça s'est excellemment passé. Peut-être parce que, prévenu par toi, je me préparais à parler pendant seize heures devant une foule indifférente, j'ai eu l'heureuse surprise de tomber sur un groupe éveillé, vif, intelligent, très à l'écoute. J'ai parlé toute la première matinée (mais avec des questions) et, après la pause, j'ai eu l'heureuse surprise que l'une me dise : « On pense qu'on comprendrait mieux ce que tu nous dis si on l'expérimentait sur la plateau ». Alléluia. Ils ont fait des choses très sensibles, en particulier le deuxième après-midi où j'ai vu deux spectacles (deux solos) d'un niveau hors école, des matières que je n'avais encore jamais perçues aussi radicales et réussies, Anna, qui vient de l'école de Zurich,  surfant sur « le vivant est un éternel écoulement » (de Nietzsche), parlant sans cesse en allemand et français et vivant par ailleurs (en dissociation) avec la confiance et l'acceptation de l'emportement du fleuve du temps — et Jean, venu le deuxième jour, même idée, mais traitement opposé, se postant sur une chaise, ouvrant un livre et le lisant pour lui, sans rien faire d'autre, mais en laissant tournoyer le vaste environnement comme cette figure de l'acteur comique passif imperturbable pendant que le monde autour de lui se déchaîne. Bref, je suis toujours bouleversé quand le théâtre apparaît d'un coup, en entier, sans retouche, spectaculaire (le reste des propositions restant dans un cadre étudiant, mais aussi très intéressantes). Bref (encore), une belle expérience de vraie vie dans une belle école ! (J'ai vu aussi le jeudi soir quatre solos de sorties de danseurs dont celui de Bastien Hippocrate, inoubliable.) T'embrasse, Yves-Noël