Cher Yves-Noël,
Merci de m’avoir donnée cette responsabilité à venir de pouvoir revoir encore et encore ce beau spectacle. Cette confiance me touche. J’espère que je ne serai pas trop à côté de la plaque. Puisque je n’ai pas vraiment suivi le processus de création (à part au travers de tes mails publics ou des longues discussions avec Olga), je ne pourrai donc que faire des retours qui sont miens. Ils sauront sûrement souvent mieux que moi ce qu’ils ont fait de bien. Mais ils auront au moins toujours une spectatrice dévouée, c’est déjà peut-être ça. N’hésite pas à m’envoyer si tu le juges bon des références de bouquins ou articles qui peuvent à ton avis nourrir mon œil bien peu entraîné. Je viens de toute façon demain car je fais la billetterie.
À demain !
Oui, tu as maintenant une lourde responsabilité — prend-la à la légère. Je viens de noter les dates, il y en a plein ! Bien sûr, tu feras des retours qui seront les tiens. Quand le spectacle commence à vivre et à être montré, je précise toujours, dans mes notes, qu’il s’agit bien de mon point de vue parmi d’autres… Mais c’est important de réunir la troupe — qui n’aurait qu’une envie : se disperser — ce qu’on appelle aussi l’entropie —, s’abîmer (y compris dans ces rapports d’école dont il s’agit — puisque c’est le projet et l’ambition — de se décoller, de se sortir de ce bain tiède pour en gagner un bien plus vaste, plus froid et chaud (l’univers !) —, de réunir la troupe, je disais, à partir d’un point de vue qui fait autorité (ce qu’on appelle « l’œil extérieur »). Etre interprète, c’est se laisser aller, s’abandonner (pour que ce soit merveilleux) ; alors, il faut des retours, et un retour, disons, autorisé, celui de celui ou celle qu’on suppose qui embrasse le spectacle (comme le rêveur d’un rêve). Je trouve que tu comprends et que tu pourras ressaisir le spectacle, simplement avec des phrases aussi vastes que : « On n’a pas besoin de voir des acteurs sur scène » ou « C’est plus beau de vous voir déposer les armes » (je cite de mémoire). Je suis sûr que les interprètes te feront confiance. Je peux te dire que ce qui m’a le plus plu, en voyant le spectacle, c’est quand je ne savais pas comment c’était fait. C’est en fait l’espace qui est physiquement métamorphosé et si on analysait (si on filmait et si on analysait), ce serait très complexe, ce qu'il s'y passe. Il faudra les encourager à se baigner dans l’espace, dans l’environnement, et à déformer cet espace, à le métamorphoser. Les spectateurs étant aussi dans cet espace, c’est là qu’il se passe des choses étonnantes que personne ne comprend, mais qui sont — c’est la magie du théâtre quand c’est beau, c’est très mystérieux — comme vécues. Ce réel. Alors le sens vient après. D’abord, la richesse de tous les sens…
Je t’embrasse et je suis très content que tu rejoignes de cette manière ce travail,
Yves-Noël
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