Échange avec une journaliste à propos d'Hamlet
Bonjour, R.,
Delphine Roustaing, de la Ménagerie, me dit que vous voudriez faire un papier sur Hamlet. Ce serait super !!!
Alors, c'est effectivement la même chose, la même matière que nous allons proposer, mais on va voir à quel point la réception en sera différente. Depuis toujours, je professe (à la suite de mes maîtres) que le contenant, pour moi, importe plus que le contenu (le "Rien n'aura eu lieu que le lieu." mallarméen) et, d'autre part, que le spectacle ne se fait (n'a lieu en fait) que dans la perception du public, que les acteurs-danseurs ne sont là que pour susciter, déclencher le déploiement du monde intérieur du spectateur. Bon. Alors, Hamlet à la Ménagerie devrait être le manifeste, la démonstration de cette pensée. Une matière déjà traversée, un environnement supprimé - ou plutôt : rendu invisible et un lieu (le "garage" de la Ménagerie) que j'aime beaucoup devrait rendre un "effet d'ensemble" beaucoup plus fort qu'à la Villette (où les acteurs avaient parfois l'air, je le reconnais, de jouer sept spectacles différents, pour la simple raison que j'avais travaillé avec chacun en solo et qu'ils n'étaient réunis que par des liens aléatoires - perception certes amusante pour certains spectateurs, Dieu soit loué ! mais perturbante pour beaucoup d'autres).
Plus précisément, techniquement, je reprends la première partie du spectacle de la Villette, je laisse de côté la partie nocturne qui me paraissait, moi, aboutie, pour me consacrer à cette première partie plus difficile formellement car sans hiérarchie, que j'espace et je temporise différemment. En fait, c'est simplement la poursuite du travail qui sera donc, cette fois-ci, plus abouti.
En fait, je peux vous dire mon sentiment (nous sommes en train de répéter) : c'est très, très beau.
Deux acteurs en plus qu'à la Villette : Bénédicte Le Lamer (qui vient de jouer avec Régy) et Jonathan Capdevielle.
C'est à la fois très strictement la même chose et très strictement différent.
Si ça vous dit de voir un filage de répétition (ou une partie d'un filage) pour vous faire une idée par vous-même de cette différence, venez vendredi ou samedi après-midi, je vous donnerai l'horaire un peu plus tard si vous le voulez bien.
Bien à vous
Yves-Noël
Chère R.,
Si vous voulez passer, demain samedi 15 mars, nous faisons deux filages : un à midi et un à 16h, à la Ménagerie.
Mais vous pouvez très bien faire un article à partir de ce que vous avez vu à la Villette : il s'agira, de toute façon, précisément de l'évocation de ce qui a été vu à la Villette - ce spectacle, Hamlet, créé à la Villette ne sera pas "vu" à la Ménagerie, mais évoqué : suppression du décor et des accessoires, de l'image (contre-jour qui met les présences en silhouettes) et parfois même du son, les lèvres des acteurs bougeant comme dans le vide intersidéral ! Par ailleurs, projection du film de Sophie Laly tourné à la Villette et exposition des photos de Marc Domage. Il s'agit de montrer qu'un spectacle évoqué, non représenté, peut-être aussi fort (ou, peut-être, plus fort) qu'un spectacle proposé. Nous sommes aidés par la figure légendaire d'Hamlet (qui, déjà, "fait spectacle", ce qui jouait aussi à la Villette) et par le chant de Jonathan Capdevielle qui envahira toute la Ménagerie (une partie des spectateurs évoluera dans toute la Ménagerie avec lui, tandis qu'une autre partie sera dans l'espace du bas, face au lieu vide de la représentation).
Ce travail, très expérimental, est le prolongement de mon premier travail à la Ménagerie sur la disparition, le bien nommé Le Dispariteur, dont vous aviez rendu compte si aimablement.
Donc, faites au mieux, amusez-vous, ce sera parfait !
Yves-Noël
« Vérité », « partage », le métier d’acteur est une expérience de l’invisible.
« En un temps infini, toute chose arrive à tout homme. » (Jorge Luis Borges, L’Immortel.)
« L’acteur doit exclure la décoration et conserver le monde intérieur... » (Anatoli Vassiliev.)
« Les acteurs jouent de telle sorte que c’est équivalent à une mise en scène. » (Anatoli Vassiliev.)
« La mort (ou son allusion) rend les hommes précieux et pathétiques. Ils émeuvent par leur condition de fantômes ; chaque acte qu’ils accomplissent peut être le dernier ; aucun visage qui ne soit à l’instant de se dissiper comme un visage de songe. Tout, chez les mortels, a la valeur de l’irrécupérable et de l’aléatoire. » Jorge Luis Borges, L’Immortel.
merci pour ce message mais difficile hier
à suivre
si jamais autre possibilité...
à suivre donc
et à bientôt
bonne journée
r.
dommage que Le Dispariteur ne tourne pas
merci pour ce long message qui nourrit les idées qui me reste de la pièce de la Villette
et re bon dimanche
Merci.
J'espérais faire une forme plus consensuelle, mais - après fin des répétitions - mon assistant me dit (et je m'en aperçois aussi) que c'est encore plus radical qu'à la Villette (encore plus "spectacle-spectre"). Tout ce que vous écrirez, si vous écrivez, sera bien. À bientôt
Yves-Noël
Delphine Roustaing, de la Ménagerie, me dit que vous voudriez faire un papier sur Hamlet. Ce serait super !!!
Alors, c'est effectivement la même chose, la même matière que nous allons proposer, mais on va voir à quel point la réception en sera différente. Depuis toujours, je professe (à la suite de mes maîtres) que le contenant, pour moi, importe plus que le contenu (le "Rien n'aura eu lieu que le lieu." mallarméen) et, d'autre part, que le spectacle ne se fait (n'a lieu en fait) que dans la perception du public, que les acteurs-danseurs ne sont là que pour susciter, déclencher le déploiement du monde intérieur du spectateur. Bon. Alors, Hamlet à la Ménagerie devrait être le manifeste, la démonstration de cette pensée. Une matière déjà traversée, un environnement supprimé - ou plutôt : rendu invisible et un lieu (le "garage" de la Ménagerie) que j'aime beaucoup devrait rendre un "effet d'ensemble" beaucoup plus fort qu'à la Villette (où les acteurs avaient parfois l'air, je le reconnais, de jouer sept spectacles différents, pour la simple raison que j'avais travaillé avec chacun en solo et qu'ils n'étaient réunis que par des liens aléatoires - perception certes amusante pour certains spectateurs, Dieu soit loué ! mais perturbante pour beaucoup d'autres).
Plus précisément, techniquement, je reprends la première partie du spectacle de la Villette, je laisse de côté la partie nocturne qui me paraissait, moi, aboutie, pour me consacrer à cette première partie plus difficile formellement car sans hiérarchie, que j'espace et je temporise différemment. En fait, c'est simplement la poursuite du travail qui sera donc, cette fois-ci, plus abouti.
En fait, je peux vous dire mon sentiment (nous sommes en train de répéter) : c'est très, très beau.
Deux acteurs en plus qu'à la Villette : Bénédicte Le Lamer (qui vient de jouer avec Régy) et Jonathan Capdevielle.
C'est à la fois très strictement la même chose et très strictement différent.
Si ça vous dit de voir un filage de répétition (ou une partie d'un filage) pour vous faire une idée par vous-même de cette différence, venez vendredi ou samedi après-midi, je vous donnerai l'horaire un peu plus tard si vous le voulez bien.
Bien à vous
Yves-Noël
Chère R.,
Si vous voulez passer, demain samedi 15 mars, nous faisons deux filages : un à midi et un à 16h, à la Ménagerie.
Mais vous pouvez très bien faire un article à partir de ce que vous avez vu à la Villette : il s'agira, de toute façon, précisément de l'évocation de ce qui a été vu à la Villette - ce spectacle, Hamlet, créé à la Villette ne sera pas "vu" à la Ménagerie, mais évoqué : suppression du décor et des accessoires, de l'image (contre-jour qui met les présences en silhouettes) et parfois même du son, les lèvres des acteurs bougeant comme dans le vide intersidéral ! Par ailleurs, projection du film de Sophie Laly tourné à la Villette et exposition des photos de Marc Domage. Il s'agit de montrer qu'un spectacle évoqué, non représenté, peut-être aussi fort (ou, peut-être, plus fort) qu'un spectacle proposé. Nous sommes aidés par la figure légendaire d'Hamlet (qui, déjà, "fait spectacle", ce qui jouait aussi à la Villette) et par le chant de Jonathan Capdevielle qui envahira toute la Ménagerie (une partie des spectateurs évoluera dans toute la Ménagerie avec lui, tandis qu'une autre partie sera dans l'espace du bas, face au lieu vide de la représentation).
Ce travail, très expérimental, est le prolongement de mon premier travail à la Ménagerie sur la disparition, le bien nommé Le Dispariteur, dont vous aviez rendu compte si aimablement.
Donc, faites au mieux, amusez-vous, ce sera parfait !
Yves-Noël
« Vérité », « partage », le métier d’acteur est une expérience de l’invisible.
« En un temps infini, toute chose arrive à tout homme. » (Jorge Luis Borges, L’Immortel.)
« L’acteur doit exclure la décoration et conserver le monde intérieur... » (Anatoli Vassiliev.)
« Les acteurs jouent de telle sorte que c’est équivalent à une mise en scène. » (Anatoli Vassiliev.)
« La mort (ou son allusion) rend les hommes précieux et pathétiques. Ils émeuvent par leur condition de fantômes ; chaque acte qu’ils accomplissent peut être le dernier ; aucun visage qui ne soit à l’instant de se dissiper comme un visage de songe. Tout, chez les mortels, a la valeur de l’irrécupérable et de l’aléatoire. » Jorge Luis Borges, L’Immortel.
merci pour ce message mais difficile hier
à suivre
si jamais autre possibilité...
à suivre donc
et à bientôt
bonne journée
r.
dommage que Le Dispariteur ne tourne pas
merci pour ce long message qui nourrit les idées qui me reste de la pièce de la Villette
et re bon dimanche
Merci.
J'espérais faire une forme plus consensuelle, mais - après fin des répétitions - mon assistant me dit (et je m'en aperçois aussi) que c'est encore plus radical qu'à la Villette (encore plus "spectacle-spectre"). Tout ce que vous écrirez, si vous écrivez, sera bien. À bientôt
Yves-Noël
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