J'adore l'hiver
La rue pavée, venteuse comme en forêt.
La pierre, les arbres, la tempête invisible.
J'adore l'hiver dans le Sud. Je "sens" la région bien mieux que l'été, son ossature, son squelette, Marguerite Duras dirait : son "graphisme". C'est pas ça. C'est incroyable le contraste des saisons. Je "sens" quelque chose bien mieux que je ne pourrais dire, mais, ça, c'est déjà trop dire.
C'est trop vaste. C'est trop vaste une journée. Partir de Marseille, aller à Avignon et revenir à Marseille, c'est trop vaste - pour un seul homme - et peut-on en parler à un autre homme sans l'alcool, sans l'amour, etc. ? Passé la matinée au Cintra, la brasserie d'Avignon juste passés les remparts - qui est mon bureau - puis l'après-midi à la Condition des Soies dans la salle où je vais jouer cet été. Les rues, les magasins, les arbres, les gens, les bêtes, les rues, avec ce froid, sont dans le même "hier" ou le même "maintenant" qu'au Moyen-âge. J'écris ce texte pour la deuxième fois (deuxième prise), je recopie ma mémoire car la première prise s'est effacé d'un clic. J'en rajoute. Ce n'est plus un texte, c'est son commentaire. (Culte de la première prise.) Je rajoute : "la masse d'oubli qu'il faut pour vivre..." Une journée suffirait. Et cette chose incroyable encore plus inintégrable par la pensée (et la sensation) : il faut vivre toute une vie, pleins de journées. J'ai pris froid. On devait enregistrer des ambiances pour l'opérette, mais pas une marchande de poissons au vieux port ! Con-ge-lés, poissons et vivants. On s'est réfugié au Maringot où, là (au whisky à dix heures du matin), on nous a joué - quoi ? - l'opérette, exactement l'opérette. Il fallait tout enregistrer, tout le café chantant le refrain de "Méditerranée", chœur parfait (ce que nous avons tant de mal à trouver à Paris). La rue des raccourcis. "Le Petit Cabanon" - et son commentaire. La réserve ("Marseille, c'est une réserve"), le désespoir ("Nous sommes une espèce en voie de disparition."), toute l'opérette jouée sans effort. Problème de câbles, évidemment, au moment d'avoir la retransmission. Mais on y retourne demain ! Si je peux influer sur le processus, je vais pas me gêner. Mais ce n'est pas sûr (que je puisse)... (Rime avec Suisse.)
Les chiens aboient, aboient, le froid, les cloches sonnent, la mer, on ne veut pas la voir, ça n'appartient pas, le froid, c'est mon pays, le vaste, la mer, ça n'appartient pas - ou comment ? En plus, il y a les livres. Les livres aussi appartiennent à ces journées si vastes, ces journées de la perception, inatteignables, dans le froid, la mer, la neige, l'amitié. On se sert les coudes, on se croise, on s'aide, on s'entraide : supporter le tout perceptif.
La pierre, les arbres, la tempête invisible.
J'adore l'hiver dans le Sud. Je "sens" la région bien mieux que l'été, son ossature, son squelette, Marguerite Duras dirait : son "graphisme". C'est pas ça. C'est incroyable le contraste des saisons. Je "sens" quelque chose bien mieux que je ne pourrais dire, mais, ça, c'est déjà trop dire.
C'est trop vaste. C'est trop vaste une journée. Partir de Marseille, aller à Avignon et revenir à Marseille, c'est trop vaste - pour un seul homme - et peut-on en parler à un autre homme sans l'alcool, sans l'amour, etc. ? Passé la matinée au Cintra, la brasserie d'Avignon juste passés les remparts - qui est mon bureau - puis l'après-midi à la Condition des Soies dans la salle où je vais jouer cet été. Les rues, les magasins, les arbres, les gens, les bêtes, les rues, avec ce froid, sont dans le même "hier" ou le même "maintenant" qu'au Moyen-âge. J'écris ce texte pour la deuxième fois (deuxième prise), je recopie ma mémoire car la première prise s'est effacé d'un clic. J'en rajoute. Ce n'est plus un texte, c'est son commentaire. (Culte de la première prise.) Je rajoute : "la masse d'oubli qu'il faut pour vivre..." Une journée suffirait. Et cette chose incroyable encore plus inintégrable par la pensée (et la sensation) : il faut vivre toute une vie, pleins de journées. J'ai pris froid. On devait enregistrer des ambiances pour l'opérette, mais pas une marchande de poissons au vieux port ! Con-ge-lés, poissons et vivants. On s'est réfugié au Maringot où, là (au whisky à dix heures du matin), on nous a joué - quoi ? - l'opérette, exactement l'opérette. Il fallait tout enregistrer, tout le café chantant le refrain de "Méditerranée", chœur parfait (ce que nous avons tant de mal à trouver à Paris). La rue des raccourcis. "Le Petit Cabanon" - et son commentaire. La réserve ("Marseille, c'est une réserve"), le désespoir ("Nous sommes une espèce en voie de disparition."), toute l'opérette jouée sans effort. Problème de câbles, évidemment, au moment d'avoir la retransmission. Mais on y retourne demain ! Si je peux influer sur le processus, je vais pas me gêner. Mais ce n'est pas sûr (que je puisse)... (Rime avec Suisse.)
Les chiens aboient, aboient, le froid, les cloches sonnent, la mer, on ne veut pas la voir, ça n'appartient pas, le froid, c'est mon pays, le vaste, la mer, ça n'appartient pas - ou comment ? En plus, il y a les livres. Les livres aussi appartiennent à ces journées si vastes, ces journées de la perception, inatteignables, dans le froid, la mer, la neige, l'amitié. On se sert les coudes, on se croise, on s'aide, on s'entraide : supporter le tout perceptif.
Labels: opérette avignon
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