Sunday, August 08, 2010

Un décor

Jésus me fait visiter un théâtre : parfait pour l’opérette. C’est le décor. (Encore un job – celui du décorateur – qui disparaît, une fois de plus…) Comme toujours, je me retiens de rester trop longtemps car je me mets à travailler immédiatement comme si on allait jouer le soir même : les spectacles affluent, les solutions, la beauté vient bercer sa palme comme une fleur se mirer. Jésus et… quel est le nom de cette femme qui nous a ouvert ? Elle aussi voulait que je reste plus longtemps. « Et vous ne voulez pas visiter là-haut ? Et la caisse, vous trouvez pas qu’elle est jolie ? – je vais vous l’ouvrir, la caisse. Et les loges, regardez mieux, n’est-ce pas merveilleux ? Allez voir celle du fond, elle est plus grande, etc. Vous avez trouvé la petite porte ? Moi, j’ai mis très longtemps à la trouver." Disons que le lieu ressemble au théâtre de Mulholland Drive. Excusez du peu. On peut tout faire. Jouer partout : l’acoustique est parfaite. Une fois par mois, de très vieux chanteurs d’opérette donnent un spectacle de leurs anciens succès. Madame Maquis, la plus vieille, chante du Damia avec un filet de voix. Cassée en deux, quatre-vingt-seize ans. "C’est ma dernière valse…" On y croit. Une voix de diseuse. Parfois elle appelle la mère de Jésus vers une heure du matin pour lui faire écouter une nouvelle chanson qu’elle est en train de travailler et qu’elle enregistre sur le répondeur… Modiano. Il y a celle qui chante Piaf dans sa petite robe noire, mais avec une jambe dans l’plâtre. "Le printemps au Portugal." Il y a les chanteurs plus jeunes (quatre-vingts ans) qui demandent qu’on vire enfin Madame Maquis qui n’a d’ailleurs plus la force que de chanter qu'une chanson, mais qui se rattrape sur la tenue, chaque fois absolument plus emplumée, pailletée que toutes les autres (excitant la jalousie). Là aussi, me dit Jésus, c’est plein de starlettes, de rivalités (référant au stage de Redjep dont j’ai déjà parlé). Mais toute cette activité les maintient en vie, autant que faire se peut. C’est dans l’ancienne rue des putes, où s’est composée aussi La Marseillaise, dans une cave (puisqu’il y a eu un moment où quelqu’un a composé cette chanson).
Je voudrais inclure les personnes âgées, c’est évident. Il faudrait aussi que Nathalie ajoute l’histoire de l’Alcazar dont la destruction a été un vrai massacre. Je pense qu’il faudrait réarranger la musique de manière à la jouer pratiquement au piano (par la mère de Jésus ?) Il y a une petite fosse, il y a la place pour mettre quelques instruments, mais le théâtre si sonore donne envie de le faire chuchoté…






(En sortant, un morceau de l'opérette (Mea Culpa dans sa version longue) s'est déclenché tout seul sur mon téléphone (ce qui n'arrive jamais). Nous l'avons écouté religieusement jusqu'au bout, avec Jésus, émus de tant d'occurrence.)

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