Wednesday, October 27, 2010

Une expo facile d’accès

Il fait du Matisse, du Dufy, du Hockney. Il peint des fleurs, des portes-fenêtres. La lumière, comme on dit, il peint la lumière de manière traditionnelle (quoi de plus traditionnel, en effet), sur les outils de technologie moderne, iPhone, iPad. Mais il peint aussi le trait. Il peint la peinture. Son œuvre est double (comme toujours). Les couleurs sont surnaturelles comme du Saint Laurent. La flamme d’une bougie fait du feu. Le soleil fait du feu. La rose fait du rose (nuances de rose). La tulipe fait du violet. Il peint aussi des verres transparents, des tasses transparentes. Une bougie à l’intérieur d’une bulle de verre transparente. Il peint des abat-jour. Il peint le fouillis de fleurs qu’on voit chez les fleuristes (je ne sais pas les noms). Il peint des routes de campagne, des champs, des graminées. Il peint des vérandas, des balustrades, des loggias. Il peint un coquelicot dans un pot. Il peint des tableaux inachevés. Il peint des cerises. « Des cerises dans un bol », dit le grand-père à sa fille. Il peint des jacinthes, des tournesols. Des roses blanches, des roses marron. Il peint la transparence de la peinture. Il peint des cactus, il peint des fleurs noyées dans des vases. « Regarde celles-là », dit le grand-père à sa fille. Il peint le soir, les intérieurs bleus, sombres et violets, volets fermés (ainsi, ça ne doit pas être le soir). Il peint des soleils à travers les persiennes. Il peint des crépuscules, des couchers de soleil. Il peint même ces fleurs avec un très grand sexe. Il peint à travers la transparence. Il peint tes yeux, mon amour – où es-tu ? Mon amour. Il peint différentes fleurs dans un même pot. Il peint des fantômes de fleurs. « Ça y est, je crois que j’ai tout vu », dit le grand-père à sa fille (c’est à ce moment-là qu’elle commence à regarder). Il peint la masse des fleurs dans des vases transparents. « Oh, le soleil… – Qu’est-ce que c’est, ces trucs verts ? – C’est des plantes. Par terre. Ça, c’est un jardin, tu vois. Une route. – Moi, j’aime mieux ça. – Voilà, viens mon chou. – Non, c’est pas fini. – Si, c’est fini. – Non, c’est pas fini… » Le truc est en boucle, mais c’est ça, l’intérêt. Se scotcher devant le truc en boucle toute la journée.* Dehors, c’est la Seine et la queue pour Basquiat. La lumière et la vraie lumière du pont de l’Alma. Le luxe écrasé par la lumière pauvre, un peu pauvre, de la vie. (De l’existence, de la vieillesse.) Il peint les descentes de la lumière et la nostalgie de la terre. Il peint déjà comme au ciel, nostalgique de la terre. Jésus se souvenant de la pluie en Galilée, de l’odeur du bois de charpente et de quelque chose qu’il n’a jamais vu au ciel et dont il a la nostalgie : la voûte étoilée. Il arrive à peindre ce que tout le monde voit.



* (C’est comme la réforme des retraites : « Ni gagnant ni perdant ».)

Labels:

0 Comments:

Post a Comment

<< Home