Le Rendez-vous du monde réel
« J’ai lu tellement d’vers – et particulièrement des vers du XVIIième, des vers soit-disant galants –, j’en ai trouvé trois-quatre de bons sur des milliers, n’est-ce pas ? Y a très peu de légèreté chez l’homme, il est lourd, n’est-ce pas ? Et alors, maintenant, il est extraordinaire de lourdeur. Depuis l’auto, l’alcool, l’ambition, la politique l’ont rendu lourd, encore plus lourd. Ce qui fait qu’écrire des livres est extrêmement lourd. Nous verrons p’t-être un jour une révolte de l’esprit contre, contre, contre le poids ! n’est-ce pas ? Mais c’est pas pour demain ! Pour le moment, on est lourd. Alors. Bon, ben. J’veux dire, en effet, si j’avais à mourir, j’écris : « Il était lourd », voilà, c’est tout. Oh, ils étaient méchants, etc. parce qu’ils étaient lourds, n’est-ce pas ? Ils étaient lourds… Ils étaient lourds-jaloux d’une certaine légèreté. Ils sont jaloux comme est jaloux une femme qui porte un coutil, n’est-ce pas ? contre celle qui porte… vêtue d’dentelle, comme celui qui a un percheron contre un pur-sang. Jaloux d’être lourd, n’est-ce pas ? c’est tout. Infirmes. Ils pèsent, ils sont infirmes, n'est-ce pas ? La lourdeur les rend infirmes. Par conséquent, on peut se méfier d’eux. Ils sont prêts à tout. Oh, oui, prêts à tout. Et pour activer encore la lourdeur, ils boivent. Alors, quand ils boivent, c’est des marteaux-pilons, n’est-ce pas ? C’est effrayant, n’est-ce pas ? Et des marteaux-pilons sans contrôle. Oui, c’est surtout ça qu’ils ont. Ils activent, ils augmentent leur poids au lieu de se rendre légers. Ah, ils sont pas du côté d’Ariel, ils sont de plus en plus Caliban, de plus en plus. »
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