Monday, August 29, 2011

J'ai eu trois nègres, pour cette première émission, que je remercie ! Pierre Courcelle, François Olislaeger, et ici, Olivier Steiner, quel beau métier

(Questions d'Aurélie Charon)






Vous avez fait quoi, ces nuits d’été ?

La nuit justement je m'efforce de ne rien faire, et c'est le plus difficile. On n’arrive jamais à ne rien faire et c'est pourtant l'activité que je préfère. Ne rien faire, rien de rien, surtout pas rêver, vous voyez ? De toute façon je ne suis bien qu'allongé. Je me suis inventé des vies que j'ai retranscrites sur mon blog, j'ai essayé d'oublier Paris, mais je n'ai pas pu oublier la Seine. J'ai pensé à Jeanne Balibar parce que j'ai peur que nous soyons fâchés. Je voudrais dire à Jeanne que je l'aime et si elle est impossible, elle l'est comme on dit des enfants, impossibles.



Vous avez fait quoi pendant les vacances ?

J'ai voyagé, j'ai transporté mon corps, je n'ai pas eu le courage de rester à la maison. Il y a eu Avignon, la Corse, Londres. En fait, j'ai déjà oublié. Je ne me rappelle que les films que j'ai vus : Melancholia, Festen, Les Bien-Aimés. J'ai lu aussi, plein de choses, mais rien en entier. J'ai pris des notes. Le problème est que je n'arrive plus à me relire. Tant pis. De toute façon, c'est écrit. Ce qui est écrit n'a plus à être écrit.



C'était quoi, la lumière de juillet et la lumière d’août ?

Il n'y a pas eu beaucoup de lumière, cet été. C'était plein de nuages partout, comme dans les films de Gus Van Sant. Ah, si, je me rappelle une éclaircie un matin dans un appartement bourgeois du 6ième arrondissement. C'était beau, j'ai eu envie de faire des photos.



Les lectures de juillet et les lectures d'août ?

Elles sont les mêmes, quand on lit, le mois, ça compte plus, on oublie.



Vous avez lu quoi ? Vous avez découvert quoi ?

J'ai découvert les Mojitos du Schmuck, un bar vers Odéon, probablement les plus chers du monde. J'ai découvert que ça se boit comme du petit lait. Et que c'est pas mal de brouter les feuilles de menthe. J'ai appris que brouter en anglais ça se dit to graze. C'est intéressant, non ? Nous sommes sur France Culture, c'est le service public, apprenons des choses. Donc brouter = to graze.



Vous avez des insomnies ? C’est quoi, la nuit, pour vous ?

J'ai une maladie qui fait que je suis souvent très fatigué donc j'ai beaucoup dormi. J'aimerais dormir un jour sur deux. C'est peut-être ce que je vais faire désormais : perdre comme ça la moitié de ma vie. Mais septembre arrive, c'est la saison des ouragans, alors les insomnies reviennent... « A voir tant de gens qui dorment et s'endorment à la nuit, je finirai par comprendre qu'il faut que je m'endorme aussi... »



Qu’est ce qui vous tient éveillé ?

Un corps chaud contre moi dans le lit. Compter les moutons.



Vous dites aux acteurs « Marchez comme si votre cœur était accroché au mur. Votre cœur à chacun, vivant, palpitant, accroché au mur »… Vous pensez que c’est la même chose pour une émission de radio ?

Non parce qu'à la radio, on ne marche pas. La radio, ce n'est pas une scène, c'est une tribune. Il manque la lumière, les ombres, la fumée. Il n'y a pas de mouvement à la radio. Bon, il y a les voix. Mais c'est pas pareil, ce sont des voix qui s'écoutent. Au théâtre, ce qui me plaît, c'est quand les voix ne s'entendent plus. Je veux dire quand les acteurs ne s'entendent plus. C'est ça accrocher son coeur au mur. Je pense là au dernier film de Christophe Honoré, la scène où Chiara Mastroianni danse seule dans le hall de l'hôtel. Je n'en dirai pas plus parce que ça ne sert à rien de commenter les films mais elle a vraiment accroché son coeur au mur.



Ce sera quoi, les questions, ce soir ?

Ce sera ce que voudront les réponses.



C’est quoi, le hasard ? C’est quoi, les voix intérieures ? Vous avez rêvé quoi, hier ? Minuit, ça vous angoisse ou ça vous soulage ?

Fanny Ardant a dit un jour qu'être actrice c'est sauter dans un train, parfois c'est l'orient express, parfois un tortillard de banlieue. Ben, le hasard, ce serait de sauter dans le premier train qui passe en fermant les yeux, et de découvrir après coup quel genre de train il s'agit.



Les voix intérieures sont celles de ceux qu'on aime, qu'on a aimés ou qu'on va aimer. Sans amour pas de voix intérieure. Cf Jeanne d'Arc, une grande amoureuse, cette petite pucelle.



Depuis que j'ai décidé d'arrêter de voir mon psy, je ne rêve plus, je n'ai plus besoin de lui faire plaisir.



Minuit, ça me soulage. Je préfère la citrouille au carrosse. « J'aime mieux vivre en enfer que de mourir en paradis. »

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