Saturday, August 25, 2012

Jadis la beauté



« Autre problème majeur de l’art musilien : le rapport de la pensée et de la littérature. Il conçoit précisément que, dans une œuvre littéraire, on puisse exprimer des pensées aussi difficiles et d’une forme aussi abstraite que dans un ouvrage philosophique, mais à condition qu’elle ne soit pas encore pensées. Ce « pas encore » est la littérature même, un « pas encore » qui, comme tel, est accomplissement et perfection. L’écrivain a tous les droits et il peut s’attribuer toutes les façons d’être et de dire, sauf la très habituelle parole qui prétend au sens et à la vérité : ce qui se dit dans ce qu’il dit n’a pas encore de sens, n’est pas encore vrai – pas encore et jamais davantage ; pas encore et c’est la splendeur suffisante qu’on nommait jadis beauté. L’être qui se révèle dans l’art est toujours antérieur à la révélation : de là son innocence (car il n’a pas à être racheté par la signification), mais de là son inquiétude infinie, s’il est exclu de la terre promise de la vérité. » 

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