Saturday, December 22, 2012

Jardin secret (Jouer Dieu)



« Alors que la connaissance dé-limite ses contenus selon une démarche qui est essentiellement celle du « non », travail de la distinction (« ceci n’est pas cela »), le postulat mystique pose l’illimité d’un « oui ». Naturellement, il s’agit d’un postulat de principe, aussi délié des circonstances que l’intention visant « tout », « rien », ou Dieu. Il a son modèle dans un mot surprenant de saint Paul à propos du Christ : « Il n’y a en lui que oui (nai) » Ce paradoxe d’un « oui » sans limites dans la circonscription d’un singulier (Jésus) esquisse une théorie, contradictoire et atopique, du Sujet (christique) ; un oui in-fini troue le champ des séparations et distinctions pratiquées par toute l’épistémologie hébraïque. Ce « oui » se répète ensuite. Le même lapsus de l’histoire (le même oubli) se reproduit. Au XVIIe siècle, Angelius Silesius va encore plus loin. Il identifie le graphe du Séparé (Jah, ou Jahvé) à l’illimité du « oui » (Ja). Dans la place du seul Nom propre (un Nom qui éloigne de toute être), il installe la désappropriation (par un assentiment à tout) Le même phonème (Ja) fait coïncider la coupure et l’ouverture, le Non Nom de l’Autre et le Oui du Vouloir, la séparation absolue et l’acceptation infinie :
Gott spricht nur immer Ja
Dieu ne dit jamais que Oui (ou : Je suis). Identité entre le « oui » christique et le « Je suis (l’Autre) » du Buisson ardent. Le séparé se retourne en exclusion de l’exclusion. Tel est le chiffre du sujet mystique. Figure de l’« abandon» ou du « détachement », le « oui » nomme finalement l’« intérieur ». »

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