Wednesday, June 12, 2013

Le Fleuve de blanc


« Il me semble que la méditation permet d’inventer un rapport au temps, ou plutôt à la durée. Mes premiers poèmes étaient plutôt courts, voire très courts (peu de vers et brefs). Je crois qu’à l’époque je pensais que la vie ne pouvait avoir lieu que par instant, de manière discontinue. Nous ne sommes pas toujours vivants et la brièveté du poème était une façon de prendre acte de la dimension épiphanique de la vie. Quelques secondes d’intensité et de longues heures de vide. Aujourd’hui, j’ai tendance à vouloir faire tenir ensemble le vide et le plein. La méditation par son rythme plus ample, par sa façon de laisser les choses venir, est un exercice de disponibilité. Elle permet d’affiner le sismographe dont je parlais tout à l’heure. On se rend accessible au monde qui vient, même quand le monde ne cristallise pas en émotion, en choc esthétique, en désir. Même quand il passe de manière indifférente. Je suis de plus en plus tenté par l’idée de méditation poétique : l’idée d’une langue souple et fluide comme un fleuve qui coulerait tranquillement le long des rives des choses et qui prendrait simplement acte de ce qui est. C’est une des raisons de mon goût croissant pour les distiques (les strophes de deux vers). J’ai l’impression que ces deux vers étreignent le fleuve de blanc qui est entre eux. »

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