Chant du cygne
« Schwanengesang D744
Opéra.19h30
Conception et mise en scène : Romeo Castellucci
Musique : Franz Schubert
Avec : Valérie Dréville et
Kerstin Avemo (soprano)
La chanteuse commence son
récital.
Très belle voix, public
conquis, applaudissements spontanés.
Et, peu à peu, on sent une
fêlure, un malaise.
Elle a du mal à continuer
mais le pianiste sans cesse la relance.
N'en pouvant plus de
tristesse, elle tourne le dos, continue de chanter, s'éloigne pour s'effondrer
enfin, épuisée.
Arrive la comédienne, sorte
de double, dos au public, elle dit les phrases entendues dans les lieder, avec
des gestes chorégraphiés simples et beaux, rappelant parfois les mouvements
d'un cygne.
Et lentement, elle réalise
que le public est là, la regarde, se nourrit de sa peine.
Elle ne veut pas qu'on la
regarde. Elle voudrait être seule.
Elle hurle, elle vocifère,
elle insulte le public… qui commence à réagir...
Mais la colère divine la
calme subitement, disparition du démon qui la tourmente et elle se livre,
défaite, au public impatient en quête d'émotion. Evidemment voyeur...
Car après tout, que
venons-nous faire là, sinon absorber la peine d'une autre pour s'en repaître
sans risque, avides de ressentir quelque chose, enfin…
A l'opposé d'un Jérôme Bel
qui caresse le public dans le sens du poil et lui donne ce qu'il veut,
Castellucci met en scène le rapport entre acteurs et public.
Et il fait se poser des questions
sans réponse immédiate ; il incite à une profonde réflexion.
Qu'aimons nous voir ? La
tristesse, le désarroi, le malheur ?
Pas uniquement sur scène
d'ailleurs, mais de façon générale…
Peut-être qu'il faudrait,
certaines fois, savoir détourner le regard et respecter le chagrin des autres,
leur désir de solitude.
Et ne pas considérer que
tout ce qui est vu doit être regardé avec délectation.
Et le paradoxe, c'est que c’est
en regardant le spectacle qu'on comprend la métaphore : du grand art !!!
Autant le dire tout de suite,
j'ai adoré ! »
Labels: citation avignon
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