Monday, January 20, 2014

R eligion Rimbaud


Dans mes nuits, je me demande pourquoi Arthur Rimbaud n’a pas donné lieu à une religion…
« Soir historique
En quelque soir, par ex, que se trouve le touriste naïf, retiré de nos horreurs économiques, la main d'un maître anime le clavecin des prés ; on joue aux cartes au fond de l'étang, miroir évocateur des reines et des mignonnes, on a les saintes, les voiles, et les fils d'harmonie, et les chromatismes légendaires, sur le couchant. 
Il frissonne au passage des chasses et des hordes. La comédie goutte sur les tréteaux de gazon. Et l'embarras des pauvres et des faibles sur ces plans stupides !
À sa vision esclave, — l'Allemagne s'échafaude vers des lunes ; les déserts tartares s'éclairent — les révoltes anciennes grouillent dans le centre du Céleste Empire, par les escaliers et les fauteuils de rocs — un petit monde blême et plat, Afrique et Occidents, va s'édifier. Puis un ballet de mers et de nuits connues, une chimie sans valeur, et des mélodies impossibles.
La même magie bourgeoise à tous les points où la malle nous déposera ! Le plus élémentaire physicien sent qu'il n'est plus possible de se soumettre à cette atmosphère personnelle, brume de remords physiques, dont la constatation est déjà une affliction.
Non ! — Le moment de l'étuve, des mers enlevées, des embrasements souterrains, de la planète emportée, et des exterminations conséquentes, certitudes si peu malignement indiquées dans la Bible et par les Nornes et qu'il sera donné à l'être sérieux de surveiller. — Cependant ce ne sera point un effet de légende ! »


Il « n'est plus possible de se soumettre à cette atmosphère personnelle, brume de remords physiques dont la constatation est déjà une affliction » If only… Soyons rimbaldiens !
De toute façon, nous le sommes. Et nous le serons. Nous allons sans doute être obligé de l’être, le nez sur les « exterminations conséquentes » de la « planète emportée ». Cette religion n’en est peut-être qu’à son essence…

« ce sont des erreurs qu'on me souffle à l'oreille, les magies, les alchimies, les mysticismes, les parfums faux, les musiques naïves » (brouillon d'Une saison en enfer). Certains disent que c’est Verlaine qui lui souffle — et c’est vrai que Verlaine, par ex, en prison, continue à se référer à ce système de « magie » (tout en devenant catholique) :
« De toutes les douleurs douces / Je compose mes magies ! »

« Pour moi, nerveux, et qu'un remords / Épouvantable et vague affole sans relâche »





« Tels qu'une grêle d'or, au fond du ciel mouvant,
Les astres flagellés tourbillonnent au vent,
Se heurtent en éclats, tombent et disparaissent ;
Veuves de leurs piliers les neuf sphères s'affaissent ;
Et dans l'océan noir, silencieux, fumant,
La Terre avec horreur s'enfonce pesamment ! »

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