Monday, November 10, 2014

P our Benoît



Le spectacle que nous préparons est un rêve de spectacle. Ce n’est pas un spectacle. Il n’a pas besoin d’être réalisable. (Mais il a besoin d’être réel — comme un rêve —, concret — comme un rêve —, « Chacun sait que dans les rêves on ne voit jamais le soleil, bien qu’on ait souvent la perception beaucoup plus vive. Les objets et les corps sont lumineux par eux-mêmes ».) Il y a qqch qui est dit par Charles Baudelaire, qui est touché, mais qu’on ne connaît pas, mais qui tourne, on le pressent, autour de ce vers : « Car je cherche le vide, et le noir, et le nu ! » Entre-temps, des astres qui s’entredévorent. Le son que je rêve, grâce à ton talent, permettrait des transpositions « physiques » des « visions » de Charles Baudelaire, c’est-à-dire des déflagrations et des télescopages « inouïs », « crus », de « couleurs » ou de « parfums » sur — comme il est dit — « le fond des ténèbres ». Comme je te disais, des toiles peintes descendent et montent à la vitesse de la lumière (ou d’un montage rapide de vidéos), mélange de tous les « goûts », des « générations », montage trivial et poétique — c’est donc une question d’impacts —, cascade d’atomes, il n’y a pas d’« état des choses ». Tiens, L’Etat des choses, c’est un titre de Wim Wenders qui me revient sans doute parce que j'ai vu passer justement tout à l’heure un photogramme des Ailes du désir où un ange dit à un autre : « Mais il n’y a pas d’autre rive, il n’existe que le fleuve ». Voilà, ça, c’est Baudelaire. Pas d’autre rive, que le fleuve...
« Aucun musicien n'excelle, comme Wagner, à peindre l'espace et la profondeur, matériels et spirituels… Il possède l'art de traduire, par des gradations subtiles, tout ce qu'il y a d'excessif, d'immense, d'ambitieux, dans l'homme spirituel et naturel. Il semble parfois, en écoutant cette musique ardente et despotique, qu'on retrouve peintes sur le fond des ténèbres, déchiré par la rêverie, les vertigineuses conceptions de l'opium. »
(Je remarque que c'est le « fond des ténèbres » qui est « déchiré par la rêverie », oui, exactement ça. )

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