L e Metteur à poil
Je suis dans une caravane, de nouveau, dans le froid, dans le chaud, dans le tiède et je lis, dans l’adaptation du Mahabharata de Jean-Claude Carrière : « La mort ne tue personne ». J’ai acheté ce livre parce que Tanguy m’a montré une page qui l’avait touchée quand je lui ai parlé de la mort prochaine de mon père. J’ai pensé à la faire lire (et tout le livre) à mon père et, maintenant, j’ai aussi envie de donner ce livre à mes neveux, le Mahabharata.
C’est dans un chapitre qui s’appelle Le jeune homme éternel. « La mort est comme un tigre cachée dans les herbes. Nous créons des enfants pour la mort. Mais la mort ne dévore pas l’homme qui a secoué sa poussière, elle ne peut rien contre l’éternité. Le vent, la vie viennent de l’infini, la lune boit le souffle de vie, le soleil boit la lune et l’infini boit le soleil. Le sage prend son vol au milieu des mondes. Quand son corps est détruit, quand il n’en reste plus trace, c’est la mort elle-même qui est détruite, et il contemple l’infini. Je me suis dit adieu à moi-même et je me vois dans tous les êtres, je suis tout ce qui n’est pas encore, je suis l’ancêtre, je suis l’espace, la cause de ma naissance c’est moi, je suis la limite de tout, infatigable, impérissable. » Je lirai ce texte à la crémation. J’aurais préféré l’enterrement. J’aime beaucoup les cimetières, l’endroit, la place (sans compter que pour les anthropologues des temps futurs, s’ils ne trouvent pas de squelettes à déterrer…) Mais mes parents préfèrent l’incinération à l'inhumation. Je trouve ça dommage, mais je lirai ce texte.
« — C’est toi le jeune homme éternel ?
— C’est moi.
— D’où viens-tu ?
— Je ne viens de nulle part. Je suis là.
— Tu as dit : la mort n’existe pas ?
— Je l’ai dit.
— Pourtant même les dieux pratiquent des pénitences pour obtenir de ne pas mourir.
— Les deux choses sont vraies, répondit le jeune homme. Les poètes estiment la mort, ils la chantent, mais moi je dis que la mort est la négligence, qu’elle est l’ignorance, et que la vigilance est l’immortalité.
Il se mit à marcher lentement autour du lit de flèches. Bhishma ferma les yeux pour l’écouter.
Il disait ceci :
— La mort est comme un tigre caché dans les herbes. »
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