S tage exceptionnel du 4 au 15 juin à Orléans
Je crois qu’on ne peut pas imaginer de différences plus grandes qu’entre Laurent Chétouane et moi. Pourtant nous sommes amis. Il y a un passage. Nous sommes amis parce que je fais l’expérience de ses pièces (qui sont des pièces d’amitié). J’aime le travail de Laurent Chétouane parce qu’il est vrai. Il a découvert ça : que la danse pouvait se danser en vrai — pas en illusion — en vrai. Et c’est ce que j’essaye aussi de proposer, quelque chose, on peut dire, de naturel, de non spectaculaire, de mineur. On est dans un monde d’absolu mensonge donc c’est à la fois facile et difficile de proposer quelque chose de vrai. Souvent on entend un interprète dire dans mes spectacles qu’il n’y a pas de spectacle (c’est une phrase qui revient). Non, au fond, il n’y a pas de spectacle. Il n’y a pas ce dehors qu’on nous propose. Ce dehors de carton-pâte. Mais il y a un dedans, dans ce décor, qui s’appelle le réel. Il y a la divinité intérieure (j’avais appelé un spectacle — je crois que ça venait de Shakespeare — Le Parc intérieur). Il y a un endroit qui est vrai, à l’air libre, oui, et qui est à l’intérieur. Un peu comme le Jésus des gnostiques, Laurent Chétouane réussit à mettre le « inward » « outward » — comment le dire en français ? le « vers l’intérieur » « vers l’extérieur ». On pourrait se passer du « vers l’intérieur », d’ailleurs, mais la maladie de l’homme, ce n’est que ça… Il s’agira d’un stage absolument expérimental. Avec Laurent, c’est très facile, il est tout le temps dans l’« experiment » (selon le mot qu’affectionnait Marguerite Duras, je me souviens) et, moi aussi, j’essaye d’inventer chaque fois une première fois, la naissance, un premier geste. Tout se passe avant la mort. Alors. Etre Dieu (j’ai donné plusieurs stages sous ce titre : Jouer Dieu), c’est avant la mort qu’on en a la possibilité. To be or not to be. Mais la divinité — la liberté — elle est à délivrer, prisonnière. Faible, fragile, vivante. Vous êtes des animaux avec des vêtements posés sur vous en vrac, des singes habillés, des chiens habillés. C’est aussi bête que ça. Les spectacles de Laurent Chétouane, pourtant très beaux, ont peut-être peu à voir avec la beauté — question centrale chez Pina Bausch, par exemple, et sans doute chez William Forsythe — et donc avec la laideur. Je n’ai jamais rencontré cela nulle part ailleurs.
Yves-Noël Genod
« Celui à qui les choses cachées appartiennent est au-delà de tous les contraires »
Gérard Depardieu : « Je ne joue pas, je vis. »
Jeanne Moreau : « Il n’y a pas de mauvais acteurs, il n’y a que des acteurs qui ont peur. »
J’ai noté une des problématiques de Laurent : « Comprendre comment le regard extérieur (existant ou pas existant) t’organise dans l’espace inconsciemment. Et quand tu en deviens conscient, quand tu le sens, tu arrives à le dépasser…»
L’art décrasse. Nous serons deux pour guider et donc un troisième qui se matérialisera entre nous dirigera ce stage.
Je propose un titre pour ce stage : Cœur contre cœur et âme pour âme
Ou bien encore : Art minimum
« Puisque ces mystères nous dépassent, feignons d’en être l’organisateur. »
Yves-Noël Genod
Labels: stage orléans
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