Tuesday, November 19, 2019


Bonsoir Yves-Noël
Ça fourmille pas mal dans ma tête, j'essaye de ne rien jeter. 
C'est amusant, aujourd'hui même je me suis imaginé en train de jouer l'ivresse en Paradis, car je l'ai fait au bar du TNB (j'étais pas ivre, je le jure), pour amuser la galerie, à trois reprises pendant le festival. 
Aussi pour te dire que nous avons travaillé avec Latifa pour certains d'entre nous (Aymen et Olga) pendant trois jours. Nous avons notamment repris quelques tableau de la pièce LOVE dans lequel je sais que tu as joué. Il s'agissait de
La mort
Combat yeux fermés 
Les lions 
Claquettes
Les duels et 5vs1
Mort x2
Coups portés 
Les cavaliers
Je suis très heureux d'avoir pu la rencontrer et d'avoir pu travailler avec elle sachant que cela m'a permis de faire des ponts avec le travail que l'on va entamé avec toi. Nous avons par exemple été en ville les yeux fermés ou encore avons improvisé des rituels, des défilés. Tant d'exercices auxquels on pourrait peut-être se prêter en groupe pour nourrir la question du hors champ (en dehors des temps de répétition avec toi) ? je ne sais pas, je dis ça comme ça.
Aussi un terme que Latifa a beaucoup employé pendant les trois jours (j'ai été très réceptif à son vocabulaire artistique, sa grammaire !) : le verbe cannibaliser
Dans la même veine que ton injonction volez 
Hâte de se retrouver tous ensemble 
A très vite
Valentin 

Ah oui ! j’aime beaucoup Latifa, avec qui j’ai commencé la danse il y a bien longtemps (mais comme elle reste jeune et belle, elle ! ça me va). J’ai vu récemment un spectacle vraiment magnifique, inoubliable, qu’elle a fait avec Antonia Baehr, très nocturne, très rêvé (deux femmes singes dans un futur improbable mais à l’aise). J’admire sa mémoire de Love et des exercices en ville, etc., que, moi aussi, quand j’avais votre âge, j’ai adoré pratiquer (avec Mark Tompkins, en particulier), tous ces exercices de conscientisation des perceptions, de regard, de contact, etc., c’était tellement magnifique ! C’est toute ma jeunesse ! Les exercices dans le noir total, aussi, sublimes. On était allé trois jours de suite avec Mark, je ne sais pas, ça devait durer une heure ou deux, dans un espace inconnu absolument noir avec l’accent, le premier jour, mis sur l’audition (il y avait la découverte du lieu qui était assez forte, on y était allé les yeux fermés, on ne savait pas où on était, mais ensuite, l’audition, c’était assez bruyant, singes de la canopée) ; au deuxième jour, en silence, l’accent mis sur le contact (c’était très affectif, comme des singes aussi qui se reconnaissent, reconnaissance de la personne, les mains touchent la tête, etc., c’est cette journée que j’avais préférée) ; et, troisième fois, toujours le contact, mais sans les mains (très sensuel aussi, mais avec un côté terrible, je trouvais, hard, comme si la personne soudain disparaissait, comme si nos n’étions que viande, sans savoir vraiment si ce qu’on touchait était cuisse ou bras et encore moins à qui — ou même à quel corps ; peut-être que cette perception «  sans les mains » aurait pu s’affiner avec le temps, je parle à partir de mon ressenti...) C’était des expériences impressionnantes ! Avec l’indication de s’y trouver, dans ce noir, soit très habillé (recouvert d’épaisseurs, de couches et de couches), soit (intégralement ou le plus possible) la peau. Aussi, en ville, partout, chez soi, mais toute la journée, l’un qui « joue » (en fait qui est observé par un deuxième, quoi qu’il fasse) et toutes les demi-heures, ça change, l’observeur devient l’observé, sans échange de paroles ; ça faisait des journées mémorables de perception augmentée ! Aussi les yeux fermés, comme vous avez fait… Tu me préciseras ce qu’elle entend avec le mot « cannibaliser » (je l’entends très bien le dire)…
C’est vrai que tu as raison d’insister sur le hors-champ, c’est sans doute la clé, certainement, dans ce lieu : fabriquer du hors-champ. Si on arrivait, pour les spectateurs, à changer leur perception du hors-champ, de l’environnement extérieur, comme s’ils étaient dans une capsule et que l’espace-temps, au dehors, changeait, évoluait, ça, ce serait beau…
Ah oui, on n'a pas introduit le thème de la science-fiction. C’est toujours bien, je trouve, quand on y arrive (même par allusion)… C’est une des grandes littérature du XXème siècle (Philip K. Dick…)
Bien à toi, 
Yves-Noël

Labels:

0 Comments:

Post a Comment

<< Home