Saturday, November 14, 2020

Yves-Noël Genod, 

metteur en scène



J’ai eu beaucoup de chance, à l’Arsenic (Lausanne) de réaliser un spectacle intitulé C’est le silence qui répond conçu dès le départ comme une expérience de « rencontres », c’est-à-dire, c’est certes toujours le cas, mais, en général, les rencontres se font en amont afin qu’une troupe se constitue, mais, ici, cette troupe était ouverte à tous (dans la limite d’une jauge de septante) : spectateurs et interprètes se mélangeant dans un espace unique, sans gradins, multidirectionnel, lumineux, nocturne, comme cela se produit pour chacun dans les rêves, chaque nuit, où l’on est à la fois l’auteur, l’acteur et le spectateur du rêve. J’ai eu la chance de rencontrer des personnes merveilleuses, certaines rencontres plus exceptionnelles encore que d’autres, véritablement comme tombées du ciel. Parmi celles-ci, j’ai eu l’immense chance de rencontrer Lily-Lucy Zoëll (née le 3 août 2007) qui, étudiante dans une école de danse classique à Zurich, était de passage un dimanche à l’Arsenic pour un concours pour l’obtention d’une bourse. Une chance fabuleuse parce que, quand nous sommes sortis du travail, mon assistant et moi, en fin de journée, Lily-Lucy était là avec ses parents et nous a demandé ce que nous faisions. Comme elle était curieuse et s’est immédiatement intéressée à ce que nous lui disions, nous avons poursuivis en lui montrant l’installation lumineuse et par des essais immédiatement concluants. Avant même que Lily-Lucy ait déployé son savoir-faire (qui est immense), mais déjà par sa simple présence dans l’espace, sa démarche, sa manière, au milieu des lumières mouvantes, comme un cosmos qu’elle rendait à sa taille, à la fois délicate et sans inhibition, Lily-Lucy a montré qu’elle était dans l’espace nocturne et lumineux de la boîte noire du théâtre (ici, radicalisée) comme un poisson dans l’eau, pleine d’idées, d’enthousiasme — et aussi — ce qui n’est pas peu — de la compréhension de ce que je lui proposais, réagissant comme une véritable interprète dans la confiance de son art. Par exemple, je lui ai dit à un moment que sa variation était certes merveilleuse, mais forcément orientée frontalement (comme l’est toujours le classique) et que, peut-être, si ce n’était pas impossible, elle pouvait la faire changer de direction de temps en temps, les spectateurs n’ayant pas de place fixe attitrée, délimitée mais se déplaçant eux-aussi, se mélangeant. Elle m’a immédiatement assuré de la possibilité qu’elle avait de faire évoluer cette variation. J’ai eu la chance qu’elle puisse revenir avec cette variation retravaillée une deuxième fois où elle a rempli l’espace encore plus entièrement de son immense talent, c’est-à-dire, bien sûr, technique, mais aussi d’imagination et de cœur. Sa joie de jouer, de partager. Une grande chance aussi que sa sœur Adélie (née le 31 mars 2009) qui, elle, travaille à l’école de Rosella Hightower à Cannes ait pu nous rejoindre pour une deuxième soirée, les représentations de ce spectacle correspondant à sa semaine de vacances. La présence des sœurs Zoëll pendant deux soirées, chacune un soir (Adélie le mercredi 28 octobre 2020 et Lily-Lucy le samedi 31) est certainement parmi les plus belles choses qui soit arrivées à cette entreprise rêvée. Elles ont apporté l’inestimable : grâce et légèreté, leurs pas menus, leurs pas de chat et leur déploiement de cygne. Oui, ces deux jeunes filles sont — en herbe — de grandes interprètes, je leur promets tout à fait sincèrement un avenir glorieux.


Yves-Noël Genod, metteur en scène du spectacle C’est le silence qui répond, représenté du 26 octobre au 1er novembre 2020


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