Monday, June 07, 2021

L e Malheur du monde


Bonjour à toutes ! (et à David aussi) 
Je propose ça, un nouveau texte qui témoigne de ce qui a eu lieu augmenté d'extraits du texte de lan passé (le chapeau reste le même). Je suis en bibliothèque cette après-midi donc pas joignable au tél (mais par mail). Joignable au tél maintenant d’ici midi 30, ce soir ou demain matin. 
Attention bien sûr, comme toujours, à bien reporter les italiques. Prière de me faire revoir la version mise en page.
Merci
YN 


Le malheur du monde, c’est la perte de la communauté, l’éparpillement des individualités. Comme sous la mort venant du ciel (le virus), une communauté vivante s’est rassemblée. Dès le 19 septembre 2020, la première rencontre, j’ai proposé : « Nous ne sommes pas du tout sûrs de nous revoir, alors considérez cette séance non comme une « répétition », mais comme une « représentation ». » C’est une méthode que j’utilise souvent, plus ou moins bien comprise d’ailleurs — elle vient de Klaus Michael Grüber —, mais, ici, c’est ce qui fait la merveille absolue de ce travail, elle a été parfaitement comprise. Dès le 19 septembre, les amateurs ont donné une « représentation » dont j’ai été le seul pince-moi-je-rêve. Dès la séance suivante, j’ai fait venir des amis (Dominique Issermann…) pour que d’autres que moi en témoignent. Toutes les activités locatives de la grande Halle ayant été suspendues, nous avons pu tout l’hiver « jouer » ce spectacle avec des participants amateurs et professionnels. Ça s’est fait avec « presque tout le monde ». Une abolition de la frontière spectateurs/acteurs. Nous nous sommes arrêtés le 31 janvier où nous avons — plus officiellement — donné une représentation pour les « pros ». Ç’aurons-nous faire écho, exactement un an après, à ce qu’il s’est passé de miraculeux ? Cette fleur du paradis sera-t-elle restée dans nos mémoires ou bien tout aura repris comme avant, la course dans le mur, la chute de la falaise, le suicide consumériste ? Yves-Noël Genod


Extrait du texte de présentation de l’an passé :

« Fabriquer des spectacles est un rêve de toutes mes nuits. Je voudrais que nous réalisions un spectacle ensemble. Ce spectacle hors de nos rêves, je voudrais qu’il ait lieu dans – et qu’il naisse aussi de la grande Halle du Carreau du Temple, de la matrice d’une architecture à l’état vacant, disponible comme un poème. Il faudrait être seul – et chacun – et tous – capable de se baigner dans le « sentiment océanique du monde » 1. […] Nous sommes des babouins, dit le philosophe 2 , il ne nous faut que le paradis. Quelque gazon de territoire. Il nous faut nous toucher, nous épouiller car on dit qu’à nous isoler nous perdons de notre intelligence. Il faudrait des danseurs avec la capacité de contaminer les foules : la virtuosité artistique que je recherche est celle qui se mélange. Comment disait le Président ? « Une gare, c’est un lieu où on croise les gens qui réussissent et les gens qui ne sont rien ». Eh bien, nous traverserons cette gare avec allégresse et légèreté parce que nous pensons, nous, que personne n’est vraiment quelque chose – ou si peu. Il y a une très belle phrase de la chanteuse Barbara. Dans une interview, on lui parle de son talent et elle s’exclame : «Mais qu’est-ce que c’est que le talent ? Est-ce que ce n’est pas entrer en scène et sourire ? » […] C’est une aventure qu’il faut promettre, de reterritorialisation de la solitude déchirante. Poème du lieu. Je ne maîtriserai pas ce qui va se passer. Non-maîtrise de ce qui va se passer. C’est tout ce qu’on se souhaite profondément dans la vie, vivre le réel, l’experiment, plutôt que, par exemple, cette manipulation des réseaux dits sociaux. Babouins, nous n’avons pas dit le dernier mot. »  

1 – Le sentiment océanique est une notion psychologique ou spirituelle formulée par Romain Rolland qui se rapporte à l’impression ou à la volonté de se ressentir en unité avec l’univers (ou avec ce qui est « plus grand que soi »).
2 – Bruno Latour dans Libération du 13 mai 2020 

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