Wednesday, September 29, 2021

P rojet d'atelier


Ne manquez pas votre unique matinée de printemps


«  Ne manquez pas votre unique matinée de printemps » est une phrase que Vladimir Jankélévitch, dit-on, avait l’habitude de dire à ses étudiants (il l’a aussi écrite dans Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien *). Elle a, comme toutes les phrases de poète ou de philosophe une multitude de sens. Elle pourra certainement nous servir de bâton de marche pour ce workshop. Cette phrase, je viens de la découvrir (j’ai donné une performance récemment à propos de Jankélévitch), mais j’en ai plusieurs autres un peu semblables qui nous servent de viatique. Par exemple, une de Marguerite Duras qu’elle a mise dans une pièce, mais qu’elle prononçait souvent aussi dans la vie (j’étais là !) : « Si nous allions au restaurant, pour une fois que nous ne sommes pas morts ».   

Je peux transmettre des choses qui nous viennent du futur, qui nous viennent du passé, la vie est la même. Elle ne s’arrête pas. Mais elle traverse des métamorphoses, des personae, des morts et des résurrections… Claude Régy m’avait dit un jour que le théâtre, pour lui, c'était « le passage d’un instant à l’autre ». Revoilà Vladimir ! L’entre. Ce qui est en train de se faire, en train de surgir, ce qui est avant même le phénomène, « sur le point de ». 

Devenir ce que l’on est. Disons qu'il y a l'instant qui est le refuge. Mais, l'instant, on ne peut pas y rester. Alors il y a la solution du temps (à la crête de l'instant). « Pour être, disions-nous, il n’y a qu’à être et cela est bien plus facile encore que vivre, respirer, que dormir, que sais-je encore, attendre ! quels que soient les mots que je choisis, ils sont tous plus déterminés que « être » ; c’est pas l'être qui est difficile, mais ce sont les manières d’être, ce sont les modes de l’être. » Eh bien, nous ferons en sorte que cette facilité, cette rêverie, cette poétique soit présence dans l'espace (c’est souvent pour certains plus facile sur scène que dans la vie),

Yves-Noël Genod, 29/09/21

« Il n’est rien de si précieux que ce temps de notre vie, cette matinée infinitésimale, cette fine pointe imperceptible dans le firmament de l’éternité, ce minuscule printemps qui ne sera qu’une fois, et puis jamais plus.  »



Rémy Yadan me demande de préciser ce qu'il va se passer, si les étudiants devront performer (en tant que personne) ou / et s'ils vont apprendre à diriger, s'ils vont regarder des films, etc. Cela (ce programme, cette spécificité) ne peut que s'élaborer ensemble et j'aimerais même — ce serait l'idéal — directement avec les étudiants. Je n'ai pas de position magistrale. Je fais avec le bon moment, le contexte et la connaissance des besoins des étudiants pour lesquels vous me demanderez d'intervenir. En général, je propose une rencontre en amont pour justement décider d'une direction. Là, comme il s'agit d'une durée courte, cette réunion préalable n'est sans doute pas nécessaire...



Bio (1)

Yves-Noël Genod a toujours joué, mis en scène. Professionnellement il a d’abord travaillé avec Claude Régy puis François Tanguy (théâtre du Radeau). A partir de la pratique du contact improvisation, il déborde vers la danse avec une collaboration principale avec Loïc Touzé. Loïc Touzé lui propose, en 2003, à l’occasion d’une carte blanche pendant le festival Let’s Dance, au Lieu Unique, à Nantes, de fabriquer son premier spectacle. Ce spectacle intitulé En attendant Genod s’appuie sur le modèle des stand-up anglo-saxons. Les  commandes (toujours des « cartes blanches ») s’enchaînent ensuite, spectacles — plus d’une centaine à ce jour — et performances présentés le plus souvent dans des festivals ou des lieux de danse ou de formes hybrides. Un théâtre dont on aurait enlevé le drame, l’action et dont il ne resterait que la poésie, le fantôme, la trace. Yves-Noël Genod a travaillé avec de nombreux interprètes qu’on retrouve maintenant sur les plus grandes scènes et, dans ce sens, on peut dire qu’il a marqué une génération.



Bio (2) 

Yves-Noël Genod ne se présente lui-même que comme un « distributeur » de poésie et de lumière. Un « Dispariteur » (nom de son association). Pour certains il s’agirait d’un « théâtre de l’invitation », d’un « théâtre chorégraphié ». C’est en tout cas un théâtre qui veut faire de la place. Créateur d’inconnu, d’irréel, de chimères… il a pourtant le sentiment de n’inventer jamais aucun spectacle qui n’existe déjà. Ce comédien — ce menteur en scène — prétend s’effacer derrière une œuvre qu’il désire n’être que trace infime, mais dans l’optique pascalienne : « Nul ne meurt si pauvre qu’il ne laisse quelque chose ». 

Yves-Noël Genod a donné de nombreux workshops, toujours inventés avec les circonstances, mais toujours avec des titres et une ambition poétiques : Leçon de Liberté, Jouer comme Gérard, Casser une noix, Jouer Dieu, Fabrique de stars, Fellation et poulet rôti... Il en a donné plusieurs dans des écoles d'art, notamment à la Villa Arçon, à Cergy, à l'Académie royale des beaux-arts de Bruxelles, à La Cambre. Il demande de préférence des lieux vastes et beaux, avec une acoustique, c'est plus facile. Ces lieux existent, mais sont rares. Alors, il se débrouille. Mais c'est beaucoup une histoire d'architecture, la vie... Citons Wallace Stevens : « Life is an affair of people not of places, but for me, life is an affair of places and that is the trouble ».

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