Salut Gilles !
Malheureusement je ne suis pas libre le 23 mars. Ce que je peux conseiller, c’est de délaisser la subtilité (que Virginia Woolf proposait, par exemple), pour y aller franco — un peu à la Boris Charmatz, mais aussi à la manière du génial Tino Sehgal dont il n’est pas facile de parler parce qu’il interdit toute reproduction de ses œuvres (films, photos, enregistrements sonores). Il avait envahi le Palais de Tokyo à Paris par un ensemble de plusieurs pièces de danse qui, occupant chacune un espace vide, pouvait n'en former qu'une seule immense. Ces pièces étaient activées par des dizaines de performers qui se relayaient pendant toute la durée de l’exposition, des groupes et des groupes. C’était paraît-il fatiguant (des amis y ont participé), mais enthousiasmant collectivement (et pour moi comme spectateur : extraordinaire). C’est ici (d’après les photos que tu as montrées) un espace immense, très beau, avec une très mauvaise acoustique, donc c’est une donnée — une contrainte — qui ne peut être qu'enthousiasmante et il faut y aller très physiquement, très « performers ». Qu’on entende ou pas, il faut accrocher sonorement « de l’écrit » C’est physique, c’est pour un effet immédiat, c’est un ensemble, ça montre que la diversité (des écritures) peut être portée collectivement. Je pense que ce n’est pas la meilleure idée de faire des choses individuellement chacun dans son coin avec les problèmes techniques qui vont occuper le temps ou l’énergie pour un résultat sans doute globalement faible (ni fait ni à faire), mais j’avoue que je parle là en spectateur qui s’ennuie souvent avec ce genre de petits stands de vendeurs à la sauvette. Je pense qu’il vaudrait mieux arriver à réinventer la force du collectif, le fil à couper le beurre. Le groupe que j’ai rencontré est potentiellement fort (groupe uniquement de ceux qui veulent, évidemment *). J’ai pensé, en me réveillant, je me suis demandé si ça ne serait pas possible que tout le monde apprenne un morceau des textes des autres et de donner cet ensemble d'extraits fort, à l’unisson, presque politiquement, comme des manifestes. A haute voix, ensemble, volontairement, regroupés comme un essaim (et ça démarre au milieu des gens) ou parfois dilatés sur plus d’espace (entourant les gens, donc), mais toujours à l’unisson. C’est peut-être très difficile, il y faut de l’enthousiasme et des répétitions, mais ce serait aussi l’avantage, si on a bien répété, d'arriver le soir même de la performance avec tout dans la tête et rien dans les poches. Evidemment, idéalement, il faudrait quand même un chorégraphe pour aider à structurer (ou l’un du groupe fait « œil exérieur » ?) Ça doit être court (et, au besoin, se donner plusieurs fois dans la soirée) et la difficulté, ce sont les cuts. Il faut trouver le moyen d’accentuer les différences, les écarts entre les extraits, peut-être parfois quelques suspensions de silence (comptées pour recommencer tous ensemble) et d'autres fois, très enchaîné au contraire, cadavre exquis. il faut qu’on ait l’impression d’écritures très opposées (dans les styles, etc.). Evidemment, plus les extraits semblent passer du coq à l’âne, plus l’unisson est impressionnant. Il faut une grande confiance, une grande jeunesse : on a raison. Enfin, voilà, il faudrait sans doute plus de temps. En tout cas, y aller au bluff comme d’habitude. Une fois les extraits choisis, les apprendre et les réciter ensemble tout le temps, tous les jours, pour les avoir bien en bouche et pouvoir ensuite les parler dans la circonstance improvisée (le soir-même)…
Voilà, c’était une suggestion. Il y en aurait sans doute beaucoup d’autres…
Bisous,
Yves-No
* Je viens de visionner un bout de vidéo où Françoise Sagan parle de la définition de Sartre de la liberté : Etre libre, ce n’est pas faire ce que l’on veut, comme les gens disent, mais c’est, plus subtil, vouloir ce que l’on peut (faire). J’ai envie de faire les choses que je PEUX faire. C’est à ce moment-là, selon Sartre, que je suis libre
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