Un homme — que j’ai rencontré quelques fois, il est très beau, je ne l’ai pas lu, hélas — me propose de publier un texte dans une revue importante. Je ne sais pas écrire — ou plutôt je sais que je ne sais pas écrire, mais que je peux écrire déjà ça, comme d’une prison : comme d’une prison. Je lui propose deux choses, mais finalement (je crois qu’il a raison) on va publier qqch sur ma mère, déjà écrit ici. Souvent, on entend qu’il faut avoir quelque chose à dire pour écrire. C’est idiot, mais c’est quand même une sensation. Ecrire ? Ecrire-ne-pas-écrire, c’est ça le problème. Il faut sans doute avoir qqch à dire pour ne pas écrire. Il n’y a qu’une chose qui compte : dire. Duras, elle avait dit (dans le journal, je me souviens, dans « Libé ») qu’elle n’avait, elle, jamais entendu personne « parler pour ne rien dire » (elle répondait à un courrier des lecteurs qui lui reprochait son intervention sur l’affaire du Petit Gregory — elle avait fait fort, faut dire…) Ecrire — ou croire qu’on écrit — est, pour moi, le danger à fuir, le miroir à briser. Alors qqch, un sujet, un motif pour ne pas écrire, oui, dans mon cas, pour ne pas s’enfermer. Une adresse, même fugace, comme ici, sur les réseaux. Il fait si beau, c’est la dernière journée, cet éternel été déjà de mon enfance s'est mondialisé, la maison est vide, je laisse monter les souvenirs, la lumière, flotter le vent. Tout à l’heure, j’irai voir ma mère. Dans 3/4 d’h, il y aura le goûter : une boisson et un gâteau sec ou mou (ma mère ne sait jamais quoi répondre). Ensuite nous irons en promenade, ma mère demandera où ? par où ? et je lui dirai, l’air de rien : « Oh, je propose que nous allions au square comme nous en avons l’habitude… » Le mot « square » n’est pas une lumière pour ma mère (parfois je dis « parc »), mais ce qui en est une, c’est : « comme nous en avons l’habitude ». Ça, ça lui plaît et ça me plaît à moi aussi. Qu’est-ce que la vie sinon une habitude ? Plaisir de la vie, habitude
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