Love Streams
« À peine le train était-il parti qu’on demandait un médecin. »
Je suis dans un train : aussitôt je me calme. Aussitôt je voyage, je voyage partout, par les mots, par la lecture, par les paysages. Je ne suis pas malheureux de ne pas m’arrêter parmi les champs et les pierres, j’aime la vitesse. La saison est grise, faible, vivante (l’amour de la terre pour la vie, pour la lumière). Le garçon à côté de moi (qui n’a pas enlevé son blouson) « compte et colorie les différentes formes » (carrés oranges, ronds bleus, six carrés, sept ronds). Les triangles rouges, les rectangles roses, le château devient superbe. Un immense coloriste est assis à mes côtés. Il pourrait signer son œuvre. On pourrait l’employer pour colorer le monde. Le travail des enfants. Aie ! il se met à remplir (d’orange) les espaces blancs restants, c’est moins beau. Il ne connaît pas le conseil de Picasso : « Achever un tableau, c’est l’achever. » Puis de rose la porte restante (il est vrai rectangulaire). Du coup on ne pourrait pas l’employer pour des bâtiments, mais pour les photos de David Lachapelle, oui. À peine achevé le coloriage, il s’en désintéresse, passe à un nouveau jeu, une nouvelle page – un chef-d’œuvre par quart d’heure. « Un poème ne peut s’articuler dans aucune langue. », qu’est-ce que tu veux dire avec une phrase pareille ? Tu veux dire… On voit ce que tu veux dire ! Si on ne devine pas sous ce qui s’écrit, ce qui se publie – la possibilité pour la parole « de se rendre aussi riche que l’instant », ça ne sert à rien. Et je n’accuse pas les auteurs, là (ces inconscients), je pense plutôt que c’est une possibilité de lecture. Cette conjoncture de données futiles expose à une telle présence de l’infini. Une parole-miracle. La camelote d’une œuvre ouvre – peut-être – sur un cri – le cri à l’intérieur du langage, ce qui détache celui-ci de son vieux commerce avec la subjectivité. Comme la terre est plate, nouvelle (et ronde, nous l’entendons – tout cela nous occupe assez peu) dans cette région du monde, « occidentale » ! Évoluer dans une pure écoute. « Mets les voyelles manquantes dans la grille pour compléter les mots de Noël. » Le fluide de vie et de mort. Les clés pour tout ouvrir. L’animal montre les dents – nouvelle parole. « Une flaque de sang s’écoule sous la porte ; elle accompagne chaque époque jusqu’à sa fin. » (Guy Voltaire.) « Nous déchirons, vent furieux, le linge des nuages et des prières... », « Les derniers jours vont croissant, ils ne finiront pas. », c’est ce que je lis à côté du garçon, sept ans (et demi) qui s’appelle Gaétan. Une lanterne éclairée en plein jour – la crétinerie – réseau pour rien. Puis l’enfant à qui j’avais demandé son prénom me dit : « Le, c’est pas attaché à Brisse. » (Dans la barbe.) – Pardon ? – Le, c’est pas attaché à Brisse. – Qu’est-ce que ça veut dire, Le Brisse ? – C’est mon nom. – Ah ! Non, je n’ai noté que ton prénom. » (Suivant ainsi le précepte de Pierre.) « – Monsieur, là, c’est un l ? – Alors, « Utilise un miroir pour épeler les noms des personnages. », oui, je crois que c’est un l. » POLICIER. « MAÎTRE… oui, c’est bon – et, après, t’as du mal à trouver ? – Non : NAGEUR. – Ah, oui, c’est ça, parfait. » Vider la mer, effacer l’horizon, désenchaîner la planète de son soleil. « C’était embêtant de colorier tout l’temps. (...) Il s’appelle Théo. C’est l’frère de Rémi. Il est derrière, Rémi. (...) Moi, j’habite à Gouffre-ville, c’est pas loin du Havre. (...) Non, là, y a un n. – Ok, ok. Gonfreville. »
Je suis dans un train : aussitôt je me calme. Aussitôt je voyage, je voyage partout, par les mots, par la lecture, par les paysages. Je ne suis pas malheureux de ne pas m’arrêter parmi les champs et les pierres, j’aime la vitesse. La saison est grise, faible, vivante (l’amour de la terre pour la vie, pour la lumière). Le garçon à côté de moi (qui n’a pas enlevé son blouson) « compte et colorie les différentes formes » (carrés oranges, ronds bleus, six carrés, sept ronds). Les triangles rouges, les rectangles roses, le château devient superbe. Un immense coloriste est assis à mes côtés. Il pourrait signer son œuvre. On pourrait l’employer pour colorer le monde. Le travail des enfants. Aie ! il se met à remplir (d’orange) les espaces blancs restants, c’est moins beau. Il ne connaît pas le conseil de Picasso : « Achever un tableau, c’est l’achever. » Puis de rose la porte restante (il est vrai rectangulaire). Du coup on ne pourrait pas l’employer pour des bâtiments, mais pour les photos de David Lachapelle, oui. À peine achevé le coloriage, il s’en désintéresse, passe à un nouveau jeu, une nouvelle page – un chef-d’œuvre par quart d’heure. « Un poème ne peut s’articuler dans aucune langue. », qu’est-ce que tu veux dire avec une phrase pareille ? Tu veux dire… On voit ce que tu veux dire ! Si on ne devine pas sous ce qui s’écrit, ce qui se publie – la possibilité pour la parole « de se rendre aussi riche que l’instant », ça ne sert à rien. Et je n’accuse pas les auteurs, là (ces inconscients), je pense plutôt que c’est une possibilité de lecture. Cette conjoncture de données futiles expose à une telle présence de l’infini. Une parole-miracle. La camelote d’une œuvre ouvre – peut-être – sur un cri – le cri à l’intérieur du langage, ce qui détache celui-ci de son vieux commerce avec la subjectivité. Comme la terre est plate, nouvelle (et ronde, nous l’entendons – tout cela nous occupe assez peu) dans cette région du monde, « occidentale » ! Évoluer dans une pure écoute. « Mets les voyelles manquantes dans la grille pour compléter les mots de Noël. » Le fluide de vie et de mort. Les clés pour tout ouvrir. L’animal montre les dents – nouvelle parole. « Une flaque de sang s’écoule sous la porte ; elle accompagne chaque époque jusqu’à sa fin. » (Guy Voltaire.) « Nous déchirons, vent furieux, le linge des nuages et des prières... », « Les derniers jours vont croissant, ils ne finiront pas. », c’est ce que je lis à côté du garçon, sept ans (et demi) qui s’appelle Gaétan. Une lanterne éclairée en plein jour – la crétinerie – réseau pour rien. Puis l’enfant à qui j’avais demandé son prénom me dit : « Le, c’est pas attaché à Brisse. » (Dans la barbe.) – Pardon ? – Le, c’est pas attaché à Brisse. – Qu’est-ce que ça veut dire, Le Brisse ? – C’est mon nom. – Ah ! Non, je n’ai noté que ton prénom. » (Suivant ainsi le précepte de Pierre.) « – Monsieur, là, c’est un l ? – Alors, « Utilise un miroir pour épeler les noms des personnages. », oui, je crois que c’est un l. » POLICIER. « MAÎTRE… oui, c’est bon – et, après, t’as du mal à trouver ? – Non : NAGEUR. – Ah, oui, c’est ça, parfait. » Vider la mer, effacer l’horizon, désenchaîner la planète de son soleil. « C’était embêtant de colorier tout l’temps. (...) Il s’appelle Théo. C’est l’frère de Rémi. Il est derrière, Rémi. (...) Moi, j’habite à Gouffre-ville, c’est pas loin du Havre. (...) Non, là, y a un n. – Ok, ok. Gonfreville. »
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