Friday, August 20, 2010

Une vache rayée de la vie

Quand je suis arrivé au Caire - c'est à cela que je pensais hier pendant le très long moment où je regarde le public sans rien dire - il y avait des vaches et des chèvres dans la rue (accrochées aux panneaux de signalisation, avec un peu de paille). Le lendemain, c'était l'Aïd, on les égorgeait. Je n'étais au courant de rien. Le centre-ville s'était vidé. Comme un dimanche, mais il y avait des policiers (l'armée) à chaque carrefour. Je me dirigeais vers le musée égyptien. C'est alors que j'ai vu la décapitation de la vache. Je me suis demandé si je restais pour regarder. Je suis resté. J'ai bien fait. Je me suis demandé si je serais resté si ça avait été l'exécution d'un homme. Oui, je serais resté. C'était exactement la même chose (pour autant que je puisse l'imaginer). La vache s'est laissée faire, attacher les pieds, puis basculer brutalement. Mais "brutalement"... A peine par rapport à ce qui allait suivre. Et qu'elle savait. Très vite. Ce serait passé très vite. Un homme est arrivé au dernier moment, sorti de la boutique, avec l'immense décapitoir et il a coupé la tête. Ensuite, ça devient technique, documentaire. Le sang groseille (comme chez Tarantino) en quantité prodigieuse (prodigalité), la merde aussi, en montagne (on doit vider les intestins). On met du sang sur le front des enfants qui regardent aussi (ça doit porter bonheur). Ce qui m'a étonné aussi, c'est que l'autre vache ne disait rien, attendant son tour à quelques mètres. Peut-être les avait-on droguées ? J'assistais à la mise à mort et j'avais le sentiment qu'un homme, lui non plus, n'aurait rien dit : que faire ? se débattre pour souffrir encore plus ? Je vous regarde et je vous juge. Histoire de la perception. Qui perçoit ?

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