Saturday, November 20, 2010

Toshiki Okada

Quand je cite, ici, je ne cite pas l’origine souvent extrêmement prestigieuse de la citation. Je cite comme si c’était moi qui formulais (moi ou n’importe qui). Ce sont des données, des vérités, des remarques qui sont pour moi de l’ordre de l’universel, des variations. Mais je suis parfois heureux que dans le recopiage (ici du magazine « Mouvement » n° 47, article de Jean-Louis Perrier) le nom du modèle apparaisse (ici Toshiki Okada). Je n’ai vu qu’un seul spectacle de Toshiki Okada, à Gennevilliers, mais je crois que je n’ai jamais eu le sentiment à ce point d’être en présence d’une intelligence supérieure. Cela se traduisait, pour moi, par un spectacle formel sans pourtant que les acteurs ne soient le moins du monde amputés à l’occupation de son exécution. Vivants, vivants (donc : « littéralement et dans tous les sens »). Comme si la forme – très complexe – vibrait toute seule et que les acteurs se contentaient d'en vivre, sans engager le moindre effort pour son exécution. Ecole japonaise, certes. Plaisir absolu.



« Si le mouvement du corps suit le sens du mot, cela n’a aucun intérêt. Le système du corps est à part. Je considère que l’expression physique doit venir de l’image. Il faut faire travailler ce qu’il y a entre corps et image.
Qu’est-ce que l’image ?
« Les acteurs prononcent des paroles, mais ce qui est important, c’est l’image. Prenez l’image d’une maison. Parlez de votre maison, de chez vous, est facile. C’est comme réciter un texte par cœur. Je demande aux acteurs de se créer une maison imaginaire. D’en dessiner le plan sur la base des informations dont ils disposent à ce moment-là, et d’explorer le décalage qui existe entre le plan et la réalité imaginaire de leur maison (Toshiki Okada dessine un petit cercle – le plan – tangent intérieurement à un grand cercle – la maison imaginaire). Le grand cercle contient toutes les informations sur la maison, le petit cercle (le plan) n’en est qu’une partie. Les acteurs doivent montrer aux spectateurs le grand cercle alors qu’ils n’ont au départ que le petit cercle. L’image est le grand cercle. Quand je leur dis de « gonfler » en répétition, c’est pour atteindre le grand cercle.
Il ne s’agit pas de constituer un personnage ?
« Je ne prends pas cela en considération. Il y a les paroles des acteurs, et il y a l’image que l’on peut gonfler. Comment la gonfler ? C’est ce comment qui conduira à caractériser un personnage, mais ce n’est pas ce qui me préoccupe.
Vous demandez aux acteurs de prendre de la distance. Est-ce une référence à Brecht ?
« Oui, c’est exactement cela.
Quelle est la place du spectateur dans ce contexte ?
« Lorsque l’acteur s’assimile à un personnage, le spectateur disparaît. C’est par la distanciation que le spectateur se met à exister. Elle se met en place en jouant face à lui.
Où se situe la séparation entre danse et théâtre ?
« Le théâtre est contraint de montrer des représentations des sentiments, la danse a la liberté de choisir de montrer ou non.
Du théâtre ou de la danse, lequel est le mieux placé pour représenter la dimension sociale ?
« C’est le théâtre, parce qu’il y a cette relation étroite entre le corps et le langage. La danse peut intervenir aussi à cet endroit-là, mais je ne pense pas être capable d’y parvenir pour l’instant. »



Voilà. Je peux aller me coucher. Mais, enfin, c’est ce genre de choses que je travaillerai – avec cruauté (exigence, joie) – à l’école du TNB.



« Pendant trois ans, j’ai suivi ses pièces comme spectateur. Je me demandais pourquoi je trouvais ça intéressant. Avant, je trouvais le théâtre bizarre, la façon de mentir en scène désagréable, écœurante même – là, ça ne l’est pas. »

« Ses pièces ne ressemblent pas à celle des petits théâtres indépendants. Elle n’obligent pas à penser, ni à sentir, ni à voir d’une manière déterminée. Elles n’obligent à rien. Chaque spectateur peut les regarder à sa manière, propre. »

« Toshiki Okada dérange en dégenrant le théâtre et la danse, comme le masculin et le féminin. »

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