Monday, July 09, 2012

Do we mean love, when we say love ?



La souffrance est la porte du non, la porte qui chasse du paradis et nous éloigne de Dieu. Tout le monde le sait, même les plantes, les brindilles, même les fleurs obscènes. La basse-cour merveilleuse que j’ai longtemps observée ce matin le sait. D’ailleurs, ces bêtes-là protégées dans l’enclos du paradis, quelle idée auraient-elles de s’en échapper ? Revenons aux fondamentaux : Nous habitons le paradis. Dieu nous aime. Dieu ne nous abandonne pas. Dieu ne peut rien quant à notre souffrance. Il est interdit de souffrir. Tout le reste est permis.






« J’écris pour répondre d’abord aux pages blanches de mon cahier. Il faut que je réponde. »

Je suis dans une ferme-auberge. Avachi. Peux pas écrire. Fatigué. Peux pas communiquer, Internet ne marche pas dans ma chambre (il faudrait que je redescende – mais je l’ai déjà fait trois fois). Ma chambre ne ferme pas à clé. J’ai vu les cochons. J’ai renoncé à la promenade. Le pays est tout simplement magnifique. Mais je vais dormir avec la mouche. C’est curieux comme la voiture tue les jambes, j’aurais pas cru. J’ai roulé dans des montagnes et des vallées et je suis fatigué des jambes. C’est curieux, c’est curieux. J’ai des livres. Des livres que j’ai emportés de Paris. Trésors à prendre, de Violette Leduc, offert par Olivier. C’est un récit de voyage, ça ressemble bien au mien. C’est en France, au petit bonheur la chance. Je le lis au hasard, c’est aussi bien, il n’y a pas de progression de toute façon. Just Kids aussi, je le lis au hasard (on connaît l’histoire). J’inaugure une nouvelle façon de lire : n’importe comment. C’est aussi bien. C’est-à-dire que j’ai la « Bible », je veux dire Dialogues avec l’ange, alors, après ça, c’est sûr, qu’est-ce que vous pouvez bien lire ? Eh, bien, n’importe quoi, au hasard, au petit bonheur la chance, du moment que l’essentiel, vous l’avez, vous l’avez à votre portée, vous pouvez vous délasser avec l’air et la lumière, la lecture de n’importe quoi. Si cette mouche pouvait se calmer, peut-être… C’est ça, l’inconvénient des fermes-auberges : il y a des mouches ! Je t’aime, j’ai envie de dire, mais je sais que c’est pour finir la ligne, rien de sérieux. Finir la ligne, voilà le plus sérieux. Mais je vais lire. Bye-bye.

Violette Leduc, on dirait qu’elle a la maladie d’écrire. Elle insiste beaucoup là-dessus. En fait, je ne suis pas sûr qu’elle dise autre chose. Elle écrit et elle dit ça : qu’elle est malade d’écrire, qu’elle est névrosée. C’est vrai qu’elle ressemble à tellement de femmes névrosées de l’écriture, Christine Angot, Virginie Despentes… Elles sont  névrosées, elles écrivent, elle disent : nous sommes folles – ou, à chaque fois : je suis folle –, mais la société l’est plus encore. Tant que la société le sera (plus folle que moi), j’écrirai. C’est pour ça qu’il vaut mieux ne pas lire de A à Z ce qu’elles écrivent : ça n’a aucun sens.

« Pourquoi la foi sommeille-t-elle au fond de la plupart des hommes ?
 – Tout un réseau de routes bétonnées
parcourt la terre en tout sens.
Elles sont vastes, larges et lisses,
et la folie les chevauche.
Il y a beaucoup de voies, beaucoup.
Ne sois pas étonnée,
si l’homme a oublié la petite, l’étroite, la seule.
La folie aspire toutes les forces. Qu’est-ce que la folie ?

LA FORCE SACREE QUI LANGUIT EN PRISON.
Mais il vous est donné de montrer la Voie. »






« LE CORPS N’EST DONNE QUE POUR DONNER. »

C’est incroyable comme les livres se ressemblent… Patti Smith « felt a pang abandoning » la « struggling city, but there was no work for me there ». Patti Smith truffe son texte de la misère, son texte de la bohème, de noms merveilleux qui montrent que, sous la lutte, elle n’a rien abandonné de la poésie, « the once-properous Walt Whitman Hotel », « I slipped a quater in the jukebox, played two sides by Nina Simone », c’est comme ça tout du long. De toute façon, elle a les Illuminations, d’Arthur Rimbaud, avec elle. Elle est parée. La différence entre Violette Leduc et Patti Smith, c’est que cette dernière aime plutôt les garçons et Violette Leduc plutôt les filles (ce qu’il faut comprendre pour s’y retrouver). Pour Olivier, tiens : « I walked into the room. On a simple iron bed, a boy was sleeping. He was pale and slim with masses of dark curls, lying bare-chested with strands of beads around his neck. » C’est drôle, le coq qui chante sans fin depuis tout à l’heure me rappelle une chambre à l’île Maurice, merveilleuse d’être improbable. J’ai dormi la fenêtre ouverte et j’ai eu un peu froid, mais je suis content d’avoir attrapé froid car il va faire si chaud dans la journée... Je me suis réveillé dans la nuit pensant que c’était l’aube, mais c’était la lune qui s’était levée et un mur blanc perpendiculaire à ma fenêtre envoyait dans la chambre sa lumière intense (de nouveau monde). Le silence était total, même les mouches avaient disparu. C’était l’hotel de rien, sans clé ni propriétaire. L’hotel que je quitterai à regret. L’hotel de ma vie, de mon désespoir ignare et dérisoire. Moi aussi, j’allais rencontrer Robert Mapplethorpe au coin de la rue. Ou peut-être une folle à Albi qui va me parler de Toulouse-Lautrec. « J’allais », « je vais », est-ce que je sais ? Nous sommes ici ensemble, chers amis. (Avec les mouches et la saleté des cochons – qui pour toujours me font penser à la pure Marlène Saldana dont le savoir me fascine : quand a-t-elle dû les observer aussi bien ?)

Sur la page Facebook que j’avais chargée hier avant que ça se décroche, il y a une photo de Johnny Lebigot que j’ai eu tout loisir de regarder encore et encore. C’est Johnny Lebigot qui dort. Lui aussi, quel regret de n’avoir pas pu lui donner de plaisir ! C’est un beau garçon, je trouve toujours. C’est-à-dire, comme je mets toujours la main dans la culotte de tout le monde quand je m’ennuie (mais je m’ennuie moins, ces derniers temps), il s’est trouvé que – c’est-à-dire, c’est l’exception qui confirme la règle – lui, à mon grand regret, ça l’a excité, j’ai dû le ramener à la maison. Il faut dire qu’on était à Avignon et qu’on était bourré, saoulé de bêtise aussi, à la sortie du « bar du In ».  Il y avait ce fan – mais j’oublie son nom, il va m’en vouloir – est-ce que ce n’est pas l’année dernière tout ça ? – à qui j’ai proposé, au point où j’en étais, de se joindre à nous, ivre mort lui aussi. Ça n’a pas été, j’ai mis tout le monde dehors au bout de dix minutes quand ça a été bien sûr – fiasco total – qu’on jouait Samuel Beckett, En attendant Godot. J'ai raccompagné Johnny au Délirium finir la nuit. Vincent Macaigne, pourtant au sommet de sa gloire sautait sur tout le monde plutôt fille : « Qui s'est qui veut coucher avec moi ? » « You're on earth. There's no cure for that. » 

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1 Comments:

Anonymous OS said...

Si tu aimes vraiment Leduc, ce dont j'ai l'impression, après Trésors à prendre tu liras La folie en Tête...
Toujours névrosée elle se plaint beaucoup mais ça ne l'empêche pas de toucher au sublime...
Je t'embrasse, bonnes routes, O

2:01 AM  

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