Jadis la beauté
« Autre problème majeur
de l’art musilien : le rapport de la pensée et de la littérature. Il conçoit
précisément que, dans une œuvre littéraire, on puisse exprimer des pensées
aussi difficiles et d’une forme aussi abstraite que dans un ouvrage
philosophique, mais à condition qu’elle ne soit pas encore pensées. Ce « pas encore » est la
littérature même, un « pas encore » qui, comme tel, est
accomplissement et perfection. L’écrivain a tous les droits et il peut s’attribuer
toutes les façons d’être et de dire, sauf la très habituelle parole qui prétend
au sens et à la vérité : ce qui se dit dans ce qu’il dit n’a pas encore de
sens, n’est pas encore vrai – pas encore et jamais davantage ; pas encore
et c’est la splendeur suffisante qu’on nommait jadis beauté. L’être qui se
révèle dans l’art est toujours antérieur à la révélation : de là son
innocence (car il n’a pas à être racheté par la signification), mais de là son
inquiétude infinie, s’il est exclu de la terre promise de la vérité. »
Labels: citation
0 Comments:
Post a Comment
<< Home