F orniquer avec la fourmi
« Il faut de la patience
à un éléphant pour forniquer avec une fourmi. » (Dicton mexicain.)
Aurélie m’avait invité à
participer à son émission qui était enregistrée au Palais de Tokyo samedi soir
en faux direct (pour passer lundi à 23h) et comme — comme vous le savez… — je
m’intéressais à qqch qui me tenait à cœur, qqch qui m’intéressais, ma première
semaine de vacances — lapsus : travail — depuis bien longtemps — et qui plus est aux Bouffes
du Nord, c’est-à-dire exactement là où je suis chez moi — ce qui fait que tout
ceci était à la fois comme réel et comme un rêve, je ne m’étais occupé de rien.
J’avais demandé un taxi et je me retrouvais, comme souvent les lundis (mais
plus tôt, cette fois), à admirer la ville où j’habitais, la ville inconnue,
mystérieuse, familière et riche dans un coucher de soleil qui faisait dire au
chauffeur : « Oui, nous avons des belles lumières, en septembre, depuis
quelques années… » Je me retrouvais dans une grande kermesse avec à la
fois des vips (tout un Paris dont je ne fais pas partie) et le grand public
mystérieux… comment peut-il s’intéresser à ces choses-là ? j’étais
fasciné. L’émission était une sorte de bal, il fallait faire danser le public
(qui s’y prêtait avec un naturel confondant) et, moi, je me prêtais au jeu,
fasciné de débarquer dans la « réalité » : on n’arrête pas d’y
tomber puisque tt fait réalité.
(« Tt est sensible », disait Pythagore) et maintenant j’écoutais et
je regardais le « Grand Journal » et le « Petit Journal »,
fasciné — et touché : ils en étaient encore là ! La joie qu’il y a à
travailler, c’est qu’on n'a plus de temps à passer à regarder les autres travailler
(laborieusement…) Il en était là, le grand public : on le désœuvrait pour
qu’il ait le temps de regarder les autres travailler, « le temps de
cerveau disponible ». Il y avait la queue à la petite table de Chloé
Delaume qui s’était mise là à la cartomancie (déguisée en Marlène Saldana) et
personne, dans la file, n’avait lu ses livres ; ces gens qui me parlaient « comme si on avait élevé les cochons ensemble » bien sûr non plus
n’avaient vu le spectacle des Bouffes ni n’avaient la moindre idée de
ce que j’étais capable de faire ; ils me voyaient comme un animateur un
peu guignol, j’imagine, c’est ce que je jouais avec ma veste argentée qui avait
servi à François Valéry pour son come-back — noyés qu’ils étaient par les
limites temporelles de leur unique univers et je pensais alors à ceux qui
avaient « trouvé le truc » pour le toucher, le « grand public », pour
l’« aimer », je pensais à Philippe Katerine qui y pensait car il
allait bien falloir que je remplisse 500 places — même si
les directeurs m’avaient dit qu’ils se contenteraient de 300 —, tricky, tricky !
Labels: paris
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