Sunday, April 27, 2014

T erre couverte d’oiseaux


Ds la vie, il suffit de faire un pas de côté, j’avais subi quelques jours un peu tendus, le souci, la société, le souci de moi-même, que faire avec cela : moi-même et que faire avec la société (existe-t-elle ?), mais, ds la vie, il suffit de faire un pas de côté, j’étais arrivé ds ma famille, il y avait les enfants, ils étaient venus me chercher à la gare, avec mon père, j’étais allé me baigner, un plan d’eau à la lisière de la ville, les enfants que j’avais emmenées étaient au tourniquet, l’eau, les ciels, ciels trop grands, trop vastes, l’été trop rapide, trop plein, trop vert, je n’avais pas vu arriver le printemps, je n’avais  pas vu arriver l’été : brutalité des saisons, le lilas, les iris (partout), les marronniers (en fleurs, comme dans les livres d’enfants) — et puis m’était revenue la phrase (la phrase qui sauve) : « Désire ce que tu as ». Si la phrase revient, c’est sauvé. Et puis je m’étais endormi tôt (ds la chambre d’enfant, mais qui n’était rien de la chambre d’enfant, j’étais juste crevé). Et je n’avais pas mis de bouchons auriculaires — à quoi bon, c’était le silence et j’étais juste crevé. Et j’avais été réveillé à l’aurore par un étourdissant concert, malgré le double vitrage : les oiseaux, les oiseaux. J’avais eu du mal à me lever, mais finalement j’avais ouvert la fenêtre : ça arrive si peu, réveille-toi, tu te réendormiras après. Milliers d’oiseaux en concert, le lotissement où les arbres avaient poussé, les cerisiers, et le lotissement donnait ensuite sur la forêt. Milliers d’oiseaux heureux, maîtres du monde. Olivier Messiaen. Cette joie fabuleuse — compréhensible — des oiseaux qui saluent — comme pour la première fois ? — l’arrivée de la lumière solaire, le retour du monde. J’avais enregistré à l’iPhone, animé d’une immense nostalgie de maintenant. Ce monde qui allait si mal, c’était un peu faux, alors ? Et penser constamment à ce monde qui allait si mal ne nous empêchait-t-il pas de penser à ce monde qui allait si bien ? Se vautrer dans le malheur, cette facilité. Immense nostalgie de ma capacité à aimer. Immense nostalgie aussi de ne plus travailler tous les jours dans le luxe de la fréquentation de Benoît Pelé — qui rend les spectacles possibles à notre époque où ils sont impossibles — car le son enregistré, Dieu soit loué, est réaliste —, ds le luxe de la fréquentation des musiciens, Bertrand Dazin, Jeanne Monteilhet, Mario Forte et Louis Laurain — pourquoi faudrait-il fréquenter des comédiens ? Les comédiens si peureux, si peureux, il faut tant d’énergie, déplacer des montagnes pour leur apprendre (à moi y compris) ce qui ne s'apprend pas, juste l’insouciance nécessaire pour jouer Tchekhov, par ex. Mais les musiciens sont sur la bonne pente (dirais-je, oui). La pente de la montagne des oiseaux et de la plaine (du 27 avril). Tout le monde partait ds la maison, tout le monde se préparait, mon frère et les enfants allaient en Ardèche, mes parents en Bretagne — petit couple à la gare —, moi, j’allais prendre leur voiture disponible et, solitaire, me balader au hasard car...
« La Poésie de la terre ne meurt jamais ».


« The Poetry of earth is never dead:   
When all the birds are faint with the hot sun,   
And hide in cooling trees, a voice will run   
From hedge to hedge about the new-mown mead;   
That is the Grasshopper’s—he takes the lead     
In summer luxury,—he has never done   
With his delights; for when tired out with fun   
He rests at ease beneath some pleasant weed.   
The poetry of earth is ceasing never:   
On a lone winter evening, when the frost    
Has wrought a silence, from the stove there shrills   
The Cricket’s song, in warmth increasing ever,   
And seems to one in drowsiness half lost,   
The Grasshopper’s among some grassy hills. »

« Disparaître loin, m’évanouir, me dissoudre et oublier
Ce que toi, ami des feuilles, tu n’as jamais connu,
Le souci, la fièvre, le tourment d’être
Parmi les humains qui s’écoutent gémir »

« Fade far away, dissolve, and quite forget      
What thou among the leaves hast never known,      
The weariness, the fever, and the fret      
Here, where men sit and hear each other groan »

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