U ne soirée chez Jean-Paul Gaultier
Vous saviez que Jean-Paul
Gaultier habitait un théâtre ? Enfin, un château-théâtre. Un opéra. C’est
au 325, rue Saint-Martin. En montant l’escalier démesuré, je pensais que je
n’allais pas survivre à la soirée. Au final, je vais plutôt mieux. Faussement
mieux, peut-être. Mais j’adore avoir un autre point de vue sur les choses.
L’amie m’avait demandé — avec quelques autres — de m’occuper à aider l’organisation d’une soirée de
bienfaisance autour de l’association Iccarre (« I care ») de Jacques
Leibowitch, une association qui demande le changement officiel du protocole des
soins des trithérapies pour les malades du sida (vous me dites si je me
trompe). Jusqu’à il y a quelques années (et encore maintenant officiellement),
les malades devaient prendre tous les jours le médicament d’une chimie très
lourde (effets secondaires) et Jacques Leibowitch s’est aperçu il y a quelques
années qu’après une première période de traitement lourd, ce n’était pas la
peine de les prendre tous les jours (mais, 4, 3 et, peut-être, dans certains
cas, seulement 2 jours par semaine). C’est un changement énorme, mais qui n’est
pas encore reconnu officiellement (et donc qui entraîne une médication
sauvage). L’association se bat pour que les médecins aient le droit d’appliquer
ces nouvelles prescriptions. Donc j’étais là pour aider, pour aider un peu à
tout, je n’avais pas de rôle bien défini contrairement à d’autres et au final
j’ai été accepté pour porter les plateaux de petits fours (délicieux, visiblement) au milieu de la foule des vieilles pies. Cela me donnait une contenance, ça m’allait à merveille. Les gens m’adoraient. J’étais gêné parce
que c’était des célébrités et je n’en connaissais pas le dixième. (C’est mon
point faible.) Impossible, par exemple, d’appeler les gens par leur prénom (ça,
ça aurait fait chic). Par exemple, cette femme très gentille qui me posait des
questions sur moi, impossible pour moi de lui poser en retour des questions sur
elle (une célébrité certainement) et impossible aussi de faire savoir à Adeline
André que je l’avais reconnue (une des rares) car elle se tenait à ses côtés et
si j’avais dit « chère Adeline », qu’aurais-je dit pour
l’autre ? L’autre donc qui m’adorait m’appelait le « vampire
pop ». Je lui répondais que c'était sans doute mon état de santé qui me plaçait à cet endroit, mais je m’apercevais aussitôt que cette mention l’effrayait, comme si, peut-être, elle avait fait un impair.
J’avais l’impression d’être un fantôme parmi cette assemblée avec mon plateau à
la main que j’allais trimballer toute la nuit jusqu’à la fin des temps dans cet
espace-opéra. L’amie me disait : « Ne la laisse pas s’enfuir, suis-la à la
trace ». « — Qui ? demandais-je en me tournant dans la direction qu’elle me montrait. — Fanny. » L'amie s'apercevait immédiatement après m’avoir dit ça que
Fanny était exactement à ses côtés. Mais Fanny n’avait pas l’air d’avoir
entendu — ou compris. J’aime Fanny Ardant. Elle est miraculeuse, cette fille.
Elle est âgée, maintenant, abîmée et, tout d’un coup, elle s’anime, quelque
chose la fait rire et elle a 20 ans, 12 ans… Je peux témoigner, c’est
phénoménal. Le Botox n’y est pour rien. Elle est fanée, et tout d’un coup
qqch la traverse, une séduction, la vie — et elle est intacte comme la plus pure
jeunesse. J’aime les actrices pour ça, cette capacité à faire surgir la beauté biologiquement. Je suis amoureux. Pourrais parler pendant des heures.
Labels: paris
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