Saturday, April 30, 2016

U n petit théâtre


J’ai refait du contact (contact improvisation). Vendredi il y a un cours à 18H30 suivi d’une jam à 19h30. Y avait un monde fou à la jam. Daniel Jeanneteau m’avait gentiment invité à la représentation supplémentaire de sa Ménagerie de verre, mais j’ai décliné. Je suis obligé de mettre mes soirées de côté si je veux refaire du sport. J’ai un prétexte : on me dit que la principale cause de mes peut-être graves problèmes de santé est le stress. Bon, en même temps, ils n’y connaissent rien, les médecins, ils font fausses routes (vivement les machines !), mais toujours est-il que j’ai maintenant un prétexte pour faire des choses déstressantes — ou même pour refuser ce que je crois qui me stresse. J’ai refusé la proposition de Phèdre, de Gwenaël Morin, après beaucoup, beaucoup d’hésitations, mais je me sens trop faible pour me lancer là-dedans — en même temps travailler plutôt que ne rien foutre m’aurait peut-être délassé. Après tout, je suis tombé malade en janvier, juste quelques jours après avoir mené à bien mon big job de Lyon… Donc, qu’est-ce que je voulais dire ? Grande affluence à la jam de vendredi soir dans une belle salle, au Palais de la Femme de l’Armée du Salut, rue de Charonne. Un endroit un peu comme un hôtel de cure. Je revois des gens que j’avais quittés il y a vingt ans, ça me plaît, ça me plaît de voir d’un coup le temps qui passe et l’éternité : il y a des gens qui font du contact depuis toujours et qui en feront jusqu’à leur mort. J’ai sympathisé avec une Suzanne, surtout à cause de ce prénom qui est l’un de mes préférés, je crois. Didier me dit aujourd’hui (au marché bio du 104) qu’elle était dans le groupe d’origine avec Mark Tompkins et lui quand Steve Paxton a introduit le contact-improvisation en France. Je ne crois pas que ce soit un prénom qui se donne en ce moment, Suzanne, mais tout à l’heure, à Canalbio, il y avait une enfant très belle, dans sa poussette, très pensive, je l’ai croisée plusieurs fois, nous avons fait nos courses ensemble et, à la caisse, j’ai demandé à sa mère comment elle s’appelait : « Simone ». Ravissant. Suzanne, Simone… bientôt il y aura des Brigitte, des Sylvie, des Murielle… des Monique… des Jacqueline… quelle merveille ! Donc qu’est-ce que je voulais dire ? au contact, j’ai aussi sympathisé avec un garçon qui s’appelle Nicolas, je crois, qui parle bien, avec application comme un enfant, avec un accent, je ne sais pas, du Tyrol, m’a-t-il dit, ou bien italien, il parle du temps et de l’intensité, de l’impossibilité de parler d’une expérience qui n’est pas prise dans le temps parce qu’on ne peut pas la prendre ni la comprendre (c’est pourtant ce qu’il essaye de faire), puis il finit par me dire qu’il aimerait bien jouer dans mon prochain spectacle, qu’il sait chanter et siffler — je lui dis qu’il n’y a pas de prochain spectacle malheureusement, il ne me croit pas, il continue à se « vendre », il fait miroiter son talent, son père l’emmenait en forêt, l’abandonnait dans la forêt peut-être, je ne sais plus, il a appris à imiter les oiseaux. Il me dit de fermer les yeux, je dis : Oui, mais rien dans la bouche (on m’avait déjà gavé de ces ignobles petits ours en gomme). Je ferme les yeux et très près de mon oreille, il m’imite le chant de deux ou trois oiseaux à la perfection. Je me réveille et je dis : Le voici, le spectacle : pas besoin d’attendre que la conjoncture s’améliore, qu’on me donne une salle, voilà un spectacle parfait, magnifique pour un spectateur, assis n’importe où à qui on demande simplement de fermer les yeux.

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