Choc au Mk2 quai de Seine : M (comme M le maudit) de Yolande Zauberman. Film archi nocturne, jamais vu un tel chef-d’œuvre. Paris et le monde sont une ville lumière : quand un chef-d’œuvre apparaît, on n’en croit pas ses yeux, c’est comme si on découvrait une nouvelle espèce, une nouvelle possibilité, un nouvel avenir, une nouvelle lumière, c’est-à-dire une nouvelle nuit. J’ai opposé assez naïvement dans un article récent le « cinéma de la connerie » et le « cinéma du réel » (ce que n’a pas compris Clarisse Fabre), ce cinoche que Duras appelait « le cinéma du samedi soir », c’est-à-dire qu’il y a une telle différence entre les films, on peut dire, de vérité, que sont les chefs-d’œuvre, et les films de variété dont la publicité est constamment faite, refaite et subventionnée même, le cinéma de consommation, raté, mauvais, mal joué. Ce film-ci est inimaginable : comment un tel aboutissement peut-il exister ? Curieusement (puisque nous sommes dans le documentaire), j’ai pensé aux chefs-d’œuvre de Fellini, je l’ai dit à Jhon quand on marchait dans la rue parmi les mendiants du crack, à La Dolce Vita précisément, et je suis assez soufflé de lire maintenant, un peu plus tard encore dans cette nuit, dans un entretien pour « Télérama », Yolande Zauberman citer ce film comme le film qui l'a « peut-être le plus influencée ». « Godard, dit-elle aussi, disait qu’une bonne fiction doit être un documentaire et un bon documentaire, une fiction ». Yolande Zauberman, sa « fiction » à elle, donc, ce film onirique, nocturne, traite du cercle vicieux des viols d’enfants, victime et coupable, faux et vrai, beau et laid, grand et petit… « Chacun est le rabbin de l’autre », entend-on dans le film. Yolande Zauberman décrit son propre travail comme « une expérience amoureuse », « une danse entre intuition et incertitude ». J’ai eu la chance de la croiser hier au Cinéma du réel, d'hier seulement je la connais — et maintenant d'aujourd’hui —, et elle est peut-être déjà aussi celle qui m'a le plus influencé — depuis maintenant et depuis toujours...
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