L 'Actrice au nom peut-être effacé (proposition de présentation de la lecture enregistrée du texte sur le parfum)
Un comédien qui n’a plus travaillé depuis longtemps (qui ne s’intéresse, dans son jardin, qu’aux fleurs et aux petits oiseaux) répond à une proposition de reprise, une demande de lecture enregistrée. Une immense paresse, ce qu’il faut bien nommer de l’ennui, ou un poil dans la main, fait qu’il va laisser les choses en l’état, laisser se perdre le message — mais finalement se ressaisit et accomplit son devoir négligé (en position couchée, vers minuit, avec l’aide d’un voisin compatissant qui lui tend un micro). Tiens, l’article parle de parfum (mais il est anosmique !) et d’affaires juteuses, de renommée de la France dans le Monde — comment cela peut-il le passionner puisqu’il ne s’intéresse (et depuis si longtemps) qu’aux insectes et aux oiseaux dans les arbres ? Il s’en faut d’un rien qu’il ne se souvienne, pourtant, d’une chose ou l’autre manquant au texte. Ça lui revient, Claude Régy — avec qui il a travaillé dans les années soixante (au théâtre Antoine, au théâtre Hébertot…) — avait, pour décorer sa salle de bain (sous les toits, rue Jean-Jacques Rousseau, à Paris), un flacon surdimensionné de N°5 offert par une actrice au nom effacé. Le comédien ne sait plus, en revanche, s’il a vécu l’Occupation et si Mademoiselle Chanel était vraiment la salope qu’on disait ou pas. Probablement, probablement. A la Libération, elle aurait été sauvée par Churchill, c’est ce qu’on dit. Il connaissait bien Mademoiselle.
(Yves-Noël Genod)
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