Sunday, May 05, 2024

Hier soir, j’ai continué ce que j’ai fait toute ma vie, de ma jeunesse à ma vieillesse : me poster devant le théâtre de la Ville avec la pancarte adéquate : « CHERCHE 1 PLACE », eh bien, encore une fois, ça a marché ! j’en ai obtenu une, gratuite qui plus est. C’est une vieille dame affreuse qui m’a désirée. Elle et ses copines font partie d’une sorte de « club senior » à qui la mairie de Paris offre deux spectacles par mois ; Pina Bausch, c’était en « bonus ». Elles m’ont fait penser un peu aux concierges de Paris à qui l’on demandait (dixit Claude Régy) de remplir le théâtre où étaient tournées les célèbres émissions d’« Au théâtre ce soir » ; eh bien, ces concierges des temps modernes ont détesté, elles sont parties à l’entracte, elles étaient furieuses, elles ont trouvé tout moche, les costumes moches, les mouvements moches, les filles moches, les musiques moches… bref, elles sont restées « à l’extérieur », comme on dit, du projet d’échange qu’offre tout spectacle surtout de Pina Bausch. Mais elles n’ont pas réussi à m’amalgamer à elles, c’est déjà ça, encore échappé à la mort, je suis restée solitaire, on n’a pas eu de prise sur moi. Moi, y en avoir tout aimé de SWEET MAMBO, depuis l’apparition de Naomi Brito. Surtout cet indéfinissable qui se passe quand on est « à l’intérieur » (comme on dit) et dont on ne peut justement pas parlé (ça tient du miracle, surtout dans une grande salle comme ça où l’on est seule, mais côte-à-côte de tant d'autres). Nazareth Panadero a répété : « La vie, c’est comme rouler en vélo : ou tu roules, ou tu tombes. » Je comprenais très bien, j’étais tombée, j’avais failli mourir et j’espérais pourtant remonter à vélo. (Oui, je sais, il faut le casque.) La scène était vide, du vent dans les voilages, et les décors étaient donnés par les musiques un peu comme pour des films. Dans ce spectacle fantôme chaque interprète le répétait : « S’il vous plaît, n’oubliez pas… » Qu’est-ce que c’était ? De la beauté et de la mort qui vont ensemble ; de la douceur (un rêve plutôt qu’un cauchemar) et de l’effacement, mais aussi la cruauté de séparer si fortement les deux genres (peut-être ce qui m’a fascinée toute ma vie, moi qui — c’est ma pauvre histoire — ai toujours souffert de ne pas être aussi correctement définie) — surtout on ne sait pas bien comment c’est fait, comment surgit une telle griserie — il semble qu’il y ait peu d’ingrédients mais que leur mélange reste secret...


C'est drôle, j'ai rêvé cette nuit, ça me revient, que je voyais Isabelle Huppert jouer dans un festival je ne sais où à l'étranger (sans doute à Barcelone, ma jeunesse), et que nous étions les seuls clients, Bobo et moi (ou Legrand et moi ? ou peut-être un mélange des deux tant je les aime tous les deux). Je disais ensuite à mon partenaire : « Tu vois, je n'aimais pas Isabelle Huppert, mais de la voir travailler si près de nous et, par un hasard bénéfique, rien que pour nous, dans la pénombre... » La sensation incomparable d'avoir le spectacle rien que pour soi, je l'avais récemment vécue avec Pierre-François Garel dans La Septième



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