Sunday, June 19, 2011

J'ai quitté sans regret chacun des stagiaires, tous plus cons les uns que les autres, plus cons et plus moches aussi...

Vincent Dedienne (stagiaire dans le stage) se fout de ma gueule. Mon Dieu, j’adore les pastiches ! Celui-ci me fait beaucoup rire.






A Pontempeyrat

Cher Journal,
Ici, il fait si froid et je me sens si seul.
J'écrivais, il y a peu : « Pontempeyrat, c'est ma maison », quel imbécile ! Pontempeyrat, c'est ma geôle, oui, c'est mon Rikers Island à moi !
Il pleut, nous avons froid, je ne te l'ai pas dit, mais ils m'ont refilé la caravane la plus pourrie, elle brinquebale et fuit. Que c'est moche, une caravane qui fuit ! Ma caravane n'est pas la seule à souffrir de déficience esthétique : tous les stagiaires (tous, sans exception) sont moches comme des poux. Des poux très moches. Comble de malheur, il s'avère qu'ils sont tous très tactiles et adoooorent me toucher, tout partout, en permanence. Je me sens glué !
Il n'y a plus de pudeur, cher Journal, plus d'intimité, et tu sais comme ce sont des notions qui comptent pour moi. Comme disait Duras, ou bien était-ce Borges ? Ou bien Lonsdale en répétition, non, peut-être que je l'ai lu sur le blog d'un ami, ou alors c'est Duras, ou un ami de Duras, ou Flaubert dans sa correspondance, ou Artaud, ou – oh, je ne sais plus, je ne sais plus ce que je voulais te dire, cher Journal..
Tu vois, je suis fatigué, je suis épuisé de faire semblant d'être heureux quand ils sont là (voilà que je cite du Dalida maintenant, ou bien est-ce une strophe de Lady Gaga que j'aurai traduite pendant mon sommeil ?...)
Oh, je ne sais plus, je voudrais des vacances, sur l'île d'Elbe ou bien à Avignon. Je voudrais de l'espace, du temps rallongé, des après-midi lentes passées dans les livres. Paris me manque, ma Chapelle, ma garde-robe…

Soi-disant je serais un individu solaire au bois duquel il fait bon se chauffer. Un stagiaire m'a dit ça (ou peut-être l'a-t-il seulement pensé ?) Toujours est-il que leurs mains baladeuses sur mon grand corps me tachent et m'épuisent. Alors je prends une demi-douzaine de douches par jour pour me laver de leurs empreintes.
Je n'en peux plus, je sens que je craque, cher Journal : ce soir, j'ai demandé à Laurence de me vernir les ongles pendant le film du soir (encore un Blier !) Je rate ma bouche quand je bois mon café le matin, et mes cheveux tombent en désuétude. Si tu n'étais pas que du papier cher journal, je t'appellerais à l'aide.
Heureusement il y a toi. Et Yann Barthes.
Bonne nuit, cher Journal, heureusement que tu es là, pour me consoler de cet exil AFFREUX.
Ton YNG






Cher Journal,

Voilà. Le stage à Pontempeyrat est enfin fini. Je n'en pouvais plus. Je vais pouvoir reprendre une vie normale, me refaire une beauté et couler des jours heureux loin de l'Anse, des prairies débiles et des caravanes insalubres. O mes théâtres, ô mes dîners en ville, ô mes métros !
J'ai quitté sans regret chacun des stagiaires, tous plus cons les uns que les autres, plus cons et plus moches aussi. Dieu qu'ils étaient moches, pauvres enfants.
Je dois confesser, cher Journal, que je leur ai fait faire n'importe quoi : se lever en pleine nuit pour écouter du Rachmaninov saturé dans un volcan, imiter Michel Berger, porter des tenues ridicules. Et ils le faisaient !
Ils écoutaient tout, ne s'inquiétaient de rien. Je pouvais dire « Gifle-le », « Embrasse-la », « Pleurs ! » ou même « Suce-le », ils le faisaient.
J'espère, cher Journal (et je te demande de croiser les doigts avec moi) qu'aucun de leurs parents n'engagera de poursuites pénales contre moi.
Cher Journal, je te quitte en te donnant un dernier conseil : n'écoute jamais parler de la Haute-Loire, ne vois jamais les films de Blier et ne bosses jamais avec des acteurs non pudiques.
Bonne nuit, cher Journal
YNG

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