Friday, June 03, 2011

« Cette chance, l’anonymat. »

« Je crois énormément que l’inconscient, c’est pas qqch qu’on a en nous, comme je disais au début : « c’est une boule fermée qu’on porte en nous », l’inconscient, c’est entre les corps. Pour ceux qu’ont fait une analyse ou qui en feront peut-être un jour ou qui en feront jamais, l’inconscient, il existe quand on parle à son psy, c’est là où il apparaît. C’est pas qqch qui est fermé, c’est toujours en relation à d’autres. »

« C’est très beau d’ailleurs quand un spectacle commence. Si j’oubliais qu’j’vais voir Elektra, ou qu’j’vais voir je n’sais quoi, l’actrice arrive sur scène, je sais pas le titre du spectacle : c’est magnifique. Elle a pas encore parlé, je ne sais pas qui elle est, ce qu’elle fait, ce qu’elle va dire. »

« Ils sont ensemble, ils vivent ensemble, ils dansent ensemble, ils se touchent, ils se parlent, ils communiquent, c’est pas avec des mots. Et on ne sait rien. Et, en même temps, on a l’impression qu’ils… »

« Cette chance, l’anonymat. »

« Sans biographie, sans nom. Un prénom, c’est déjà toute une biographie. »

« Quand ils arrivent près d’vous et qu’ils s’assoient au sol, la façon qu’ils ont d’être ouverts à l’extérieur et ouverts à eux. On sait même pas s’ils s’connaissent, s’ils s’connaissent pas. Peut-être qu’ils s’connaissent depuis quarante ans ou ils s’connaissent pas du tout. Ça fait plus d’différence. »

« Quand j’vais au théâtre et que je n’sais pas, la pièce s’appelle Antigone, j’vois l’actrice arriver sur scène, de suite, j’suis Antigone. En tant qu’spectateur, j’ai une quantité inouïe d’associations qui déjà apparaît. Même mon frère qui va jamais au théâtre, qui supporte pas ça, Antigone, il sait en gros, il va dire, c’est celle qu’a fait des conneries, là, chais pas quoi, avec l’oncle, il va savoir ça ou il va en avoir entendu parler. Déjà : projection. Et ce rêve que les projections ne puissent plus coller. Les projections du regard du spectateur d’un coup ne puissent plus accrocher au corps de l’acteur. Et c’est dû au fait que, quand l’actrice arrive sur scène qui joue Antigone et comme elle regarde le spectateur aussi avec son corps. Tout d’un coup, y a une espèce de blocage de l’identification habituelle. Donc y une espèce de page blanche. »

« Quand l’acteur parle le texte et c’est le texte, d’un coup, qui va ouvrir en lui les émotions. C’est pas l’acteur qui pompe les émotions pour parler l’texte. Qui dit : Ok, là, le personnage est triste, j’arrive sur scène, j’suis d’jà la gueule jusqu’en bas et j’commence à parler mon texte. Non. Tu vas parler l’texte d’une certaine façon et ça t’ouvre en toi les espaces émotionnels nécessaires pour ce texte. »

« Et puis les mots, ça a une résonance. Le mot « père » chez toi, il va évidemment résonner d’façon différente que chez toi. »

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