Merci beaucoup, Paris !
Dernière minute : Ce soir, lundi 24 septembre, je me fais couper les cheveux à la radio (en direct) dans l’émission d’Aurélie Charon, à 23h, sur France Culture, « L’Atelier intérieur ». On me demande de ces choses… Pourtant, « Je suis mes cheveux », dit Jean-Paul Sartre.
Un jour – j’avais sept ans
– mon grand-père n’y tint plus : il me prit par la main, et dit que nous
allions faire une promenade. Mais à peine avions-nous tourné le coin de la rue,
il me poussa chez le coiffeur en me disant : « Viens, nous allons faire une
surprise à ta mère. » J’adorais les surprises. Il y en avait tout le temps chez
nous. Cachotteries amusées ou vertueuses, cadeaux inattendus, révélations
théâtrales suivies d’embrassements : c’était le ton de notre vie. Quand on
m’avait ôté l’appendice, ma mère n’en avait pas soufflé mot à Karl pour lui
éviter des angoisses qu’il n’eût, de toute manière, pas ressenties. Mon oncle
Auguste avait donné l’argent ; revenus clandestinement d’Arcachon, nous nous
étions cachés dans une clinique de Courbevoie. Le surlendemain de l’opération,
Auguste était venu voir mon grand-père : « Je vais, lui avait-il dit,
t’annoncer une bonne nouvelle. » Karl fût trompé par l’affable solennité de
cette voix : « Tu te remaries ! » « Non, répondit mon oncle en se souriant,
mais tout s’est très bien passé. » « Quoi, tout ? », etc. Bref les coups de
théâtre faisaient mon petit ordinaire et je regardai avec bienveillance mes
boucles rouler le long de la serviette blanche qui me serrait le cou et tomber
sur le plancher, inexplicablement ternies ; je revins glorieux et
tondu.
Il y eu des cris, mais pas
d’embrassements et ma mère s’enferma dans sa chambre pour pleurer : on avait
troqué sa fillette contre un garçonnet. Il y avait pis : tant qu’elles
voltigeaient autour de mes oreilles ; mes belles anglaises lui avaient permis
de refuser l’évidence de ma laideur. Déjà, pourtant mon oeil droit entrait dans
le crépuscule. Il fallut qu’elle s’avouât la vérité. Mon grand-père semblait
lui-même tout interdit ; on lui avait confié sa petite merveille, il avait
rendu un crapaud : c’était saper à la base ses futurs émerveillements.
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