Sunday, May 19, 2013

Julien et Jeanne


Julien regardait des pornos, bon, mais Jeanne qui le découvrait soudain (il lui avait montré qqch sur son ordinateur et les liens étaient apparus) ne l’admettait pas. Ou mal. Enfin, elle boudait. Ou — comment dit-on en français moderne ? — elle « faisait la gueule ». « J’ai l’impression que tu me trompes avec des Polonaises. » « Tu te trompes, avait-il répondu, c’étaient des Russes. » Mais, l’humour, au matin, était tombé à plat ; ils ne s’étaient pas revus de la journée et, là — et alors qu’elle habitait tout près et que c’était prévu —, elle ne venait pas le rejoindre à la fête (de chez François). Echanges de textos et — dans la réalité — il en était réduit à se morfondre et à imaginer des stratégies pour amortir le coup. Mais ces stratégies se réduisaient, au fond, à faire durer le temps jusqu’à  ce que tout le monde tombe de fatigue et Jeanne aussi, quand il allait la retrouver, probablement dormirait déjà. Tout glissait. Tout glissait dans cet appartement où on avait pas le droit de fumer (je soutenais), cet appartement blanc près de Paris, près du canal, près du Centre National de la Danse. Julien était danseur et Jeanne, comédienne. J’essayais de me souvenir de l’émission de Brigitte Lahaie qui abordait justement le sujet : « J’aime plus que tout au monde ma femme, mais je regarde du porno, est-ce que c’est mal ? » Je pense que Brigitte Lahaie disait que ce n’était pas du tout mal. Les complications venaient que le type (le brave type) allait aussi chatter et aussi, finalement, une fois, avait donné r-v à une fille, alors, là, évidemment, c’était jouer avec le feu, mais regarder du porno, non. Mais François (on ne prête qu’au riche) avait la bonne réponse : « Il faut que tu prennes les choses autrement (par un autre bout) : demande-lui si elle se masturbe. » J’avais connu Julien alors qu’il était encore quasi puceau et, maintenant, je le retrouvais dans les affres de la vie de trentenaire bobo, je veux dire : qui a un peu de chance, ce qui lui permet de se poser les vrais problèmes (pas les faux problèmes comme les miens ou ceux des célibataires qui n’arrivaient à rien, en prise simplement avec la brutalité du vide, la fin de la vie à chaque s, la fin de la libido, la fin de la planète et la fin du bien et du mal, à chaque s.)

Labels:

0 Comments:

Post a Comment

<< Home