L a Vulgarité du samedi — Que fais-tu ce soir ?
Je suis assis sur les
marches de l'hôtel particulier — celui de Thimothy — où j'ai joué l'année
dernière, en face du théâtre. De temps en temps, chie un pigeon. Jusqu'à
maintenant, je n'ai eu que des éclaboussures. J'apprends mon texte (il y a un
début à tout !) comme les jeunes qui passent les concours d'entrée
dans les conservatoires... Je suis concentré. Je regarde passer les gens dans
la rue comme dans une ornière. Je les vois de loin, de près et encore de loin. Quand j'avais visité la prison Sainte-Anne où a
lieu en ce moment une exposition d'art contemporain (la prison qui a été la
plus vétuste de France est désaffectée), quand j'étais ressorti, j'avais
ressenti la ville d’Avignon, ses labyrinthes, son « champs clos », comme une prison autour de la prison.
Mais je me sens bien dans cette prison. « Il me semble parfois que mon
sang coule à flots / Ainsi qu'une fontaine aux rythmiques sanglots. » Je loge au bord des remparts et la porte des remparts
donne sur le fleuve et la verdure de l'autre côté du fleuve. Le théâtre accueille des Taïwanais. L’un joue du diabolo. Mais,
maintenant, on entend du bout de la rue les hurlements du match Brésil-je sais quoi, le théâtre est fermé et je suis sur le bord. J'apprends à lire avec Charles Baudelaire. Le fleuve me passe à travers les veines. Je suis seul, inaccessiblement
seul. Sans douleur, comme un prisonnier heureux.
Labels: avignon
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