Jean Pierre Ceton
*Hello Yvno,
Un petit mot d'après Vitry pour te dire que je me souviens de ton spectacle avec jubilation.
Je ne sais d'ailleurs si spectacle est le mot, plutôt expérience de théâtre ou même voyage carrément esthétique dans un au-delà finalement proche (possible donc)...
Comme je te disais, il y a beaucoup de choses que j'ai aimé dans tout ça.
Depuis, j'ai regardé la vidéo et donc écouté avec plus d'attention le texte que j'avais tort de rejeter l'autre soir.
En fait il me heurte car il me semble porter ce contre quoi mon travail doit affronter pour se développer.
J'y entends une sorte de complainte obligée et rituelle, une forme de révolte historique contre les dieux.
Ce qui empêche à mon avis de voir ce que l'on devrait voir de ce temps, par exemple l'accroissement des connaissances et des possibilités que j'essaie en effet de mettre en avant.
Du coup je reprochais à ce texte de ne pas s'envoler comme je le voudrais et vers où je crois il le faudrait.
Je sais qu'en cela je m'affronte à fort et très fort, et pourtant jamais la pensée et l'écrit n'ont été autant présents.
Merci en tout cas et grand bravo, j'espère découvrir bientôt d'autres travaux de toi et en parler à l'occasion.
(salut d'amitié à Hélèna)
bises,
jpc
*
oui, ce texte, il est ce qu'il est – sans doute assez faible (mais il s'énonce ainsi). C'était circonstanciel de le faire – et sans doute nécessaire aussi (saisi au vol). Au début je pensais qu'on y mettrait ce qu'on veut, Liliane disait : tu peux couper tout ce que tu veux, tu peux mettre d'autres textes à la place ou de la danse, etc., mais finalement on s'en est servi comme d'un exercice de théâtre (où peu importent les mots...), donc on n'a rien coupé et on a rajouté que les deux extraits de poèmes de Paul Verlaine et l'article du magazine "Mademoiselle" sur l'hystérie... Je crois que dans l'idée de Liliane, ce texte, c'est détruire – détruire la poésie (une mort de théâtre) pour qu'elle renaisse de ses cendres autrement. Détruire la personne aussi. Un titre qui avait été envisagé était : Tuer la dernière. Je conçois très bien comment, quand on s'aperçoit du sens (de ce sens), on peut en être dégoûté. Moi-même... Toute l'ambiguïté – comme on dit "le fil", "sur le fil" – de ce spectacle a été (et encore ce soir et demain) de manipuler les éléments morbides du texte (qui pullulent), comme radioactifs – et de les désamorcer pour empêcher la contamination d'une seule personne du public si proche et si rare et ne faire advenir que la seule ouverture qui, elle, n'a pas même besoin d'advenir parce qu'elle est déjà là, depuis toujours et qu'elle peut résonner de personne à personne indépendamment du théâtre des mots et des personnages, de l'amertume des histoires fragmentaires, des folies... Parfois ce spectacle me fait penser aux conférences que Groddeck donnait à ses malades - j'ai l'impression qu'il "marche" sur un public "malade" (c'est à dire "démuni") et qu'il leur fait du bien alors - parce qu'ils n'ont rien à perdre. Les gens qui ont réussi à se perdre jusqu'à Vitry avaient sans doute cette disponibilité au soin - ou au sens - ou au pas trop à perdre... Je pense moi aussi que la société est beaucoup plus active et diverse et réelle que ne le dit le texte de Liliane (les morts préférés aux vivants, etc.) C'est étrange de faire ce travail car tout ce qu'on en dit semble toujours contenu, dit, dans les mots de la pièce, "J'ausculte pour améliorer." Comme si le commentaire était dans – et à la place – du texte.
Bises
À bientôt
Yvno
Un petit mot d'après Vitry pour te dire que je me souviens de ton spectacle avec jubilation.
Je ne sais d'ailleurs si spectacle est le mot, plutôt expérience de théâtre ou même voyage carrément esthétique dans un au-delà finalement proche (possible donc)...
Comme je te disais, il y a beaucoup de choses que j'ai aimé dans tout ça.
Depuis, j'ai regardé la vidéo et donc écouté avec plus d'attention le texte que j'avais tort de rejeter l'autre soir.
En fait il me heurte car il me semble porter ce contre quoi mon travail doit affronter pour se développer.
J'y entends une sorte de complainte obligée et rituelle, une forme de révolte historique contre les dieux.
Ce qui empêche à mon avis de voir ce que l'on devrait voir de ce temps, par exemple l'accroissement des connaissances et des possibilités que j'essaie en effet de mettre en avant.
Du coup je reprochais à ce texte de ne pas s'envoler comme je le voudrais et vers où je crois il le faudrait.
Je sais qu'en cela je m'affronte à fort et très fort, et pourtant jamais la pensée et l'écrit n'ont été autant présents.
Merci en tout cas et grand bravo, j'espère découvrir bientôt d'autres travaux de toi et en parler à l'occasion.
(salut d'amitié à Hélèna)
bises,
jpc
*
oui, ce texte, il est ce qu'il est – sans doute assez faible (mais il s'énonce ainsi). C'était circonstanciel de le faire – et sans doute nécessaire aussi (saisi au vol). Au début je pensais qu'on y mettrait ce qu'on veut, Liliane disait : tu peux couper tout ce que tu veux, tu peux mettre d'autres textes à la place ou de la danse, etc., mais finalement on s'en est servi comme d'un exercice de théâtre (où peu importent les mots...), donc on n'a rien coupé et on a rajouté que les deux extraits de poèmes de Paul Verlaine et l'article du magazine "Mademoiselle" sur l'hystérie... Je crois que dans l'idée de Liliane, ce texte, c'est détruire – détruire la poésie (une mort de théâtre) pour qu'elle renaisse de ses cendres autrement. Détruire la personne aussi. Un titre qui avait été envisagé était : Tuer la dernière. Je conçois très bien comment, quand on s'aperçoit du sens (de ce sens), on peut en être dégoûté. Moi-même... Toute l'ambiguïté – comme on dit "le fil", "sur le fil" – de ce spectacle a été (et encore ce soir et demain) de manipuler les éléments morbides du texte (qui pullulent), comme radioactifs – et de les désamorcer pour empêcher la contamination d'une seule personne du public si proche et si rare et ne faire advenir que la seule ouverture qui, elle, n'a pas même besoin d'advenir parce qu'elle est déjà là, depuis toujours et qu'elle peut résonner de personne à personne indépendamment du théâtre des mots et des personnages, de l'amertume des histoires fragmentaires, des folies... Parfois ce spectacle me fait penser aux conférences que Groddeck donnait à ses malades - j'ai l'impression qu'il "marche" sur un public "malade" (c'est à dire "démuni") et qu'il leur fait du bien alors - parce qu'ils n'ont rien à perdre. Les gens qui ont réussi à se perdre jusqu'à Vitry avaient sans doute cette disponibilité au soin - ou au sens - ou au pas trop à perdre... Je pense moi aussi que la société est beaucoup plus active et diverse et réelle que ne le dit le texte de Liliane (les morts préférés aux vivants, etc.) C'est étrange de faire ce travail car tout ce qu'on en dit semble toujours contenu, dit, dans les mots de la pièce, "J'ausculte pour améliorer." Comme si le commentaire était dans – et à la place – du texte.
Bises
À bientôt
Yvno
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